09 février 2010
Haïti, à l'ombre de Toussaint Louverture
Haïti, à l’ombre de Toussaint Louverture
Le blogueur Yoro à lancé il y a quelques jours, une chaîne de solidarité particulière à l'adresse de Haïti. Le principe est simple : écrire quelques lignes pour ce pays. Ensuite taguer trois autres blogueurs. J'ai été tagué par Mohamed Billy. Je m'exécute donc, mais de bonne grâce.
Aider Haïti, c'est bien ; mais savoir ce qu'il constitue comme symbole, c'est encore mieux. Cela permettra à bien des gens de ne pas le traiter d'ingrat plus tard.
Dans le drame qui vient de secouer Haïti en ce début de l’année 2010, nombreux sont certainement les Africains et les Afrodescendants du monde entier qui suivent les événements avec une pointe au cœur à cause de la symbolique que représente ce minuscule pays dans la conscience collective des Noires. Ce drame rappelle en effet à chacun que Haïti est la première république noire sortie du joug de l’esclavage et de la traite négrière qui ont duré cinq siècles.
Dès lors, on ne peut que penser à la figure historique du principal héros de son indépendance : Toussaint Louverture. Arrêté au cours de son entrevue avec le général Brunet le 7 juin 1802, il fut transféré avec toute sa famille sur un navire qui appareilla sans trop tarder pour la France. Un arrêté consulaire en date du 23 juillet 1802, signé par Napoléon, le fit transférer et interner au fort de Joux, où il sera tenu au secret avec son domestique Mars Plaisir. Il arrive à cette forteresse située sur la frontière suisse, près de la ville de Pontarlier, le 23 août 1802 et n'en sortira que mort le 7 avril 1803.
Quelques mois après sa mort, la guérilla noire vient à bout des forces françaises. Vaincues, celles-ci quittent Saint-Domingue le 19 novembre 1803 qui devient alors une colonie autonome. Le 1er janvier 1804, Jean-Jacques Dessalines officialise l'indépendance de la colonie. La naissance de la République noire d'Haïti sonne alors comme la victoire posthume du général en chef des armées françaises de Saint-Domingue, Toussaint Louverture. Dans la fièvre de la Révolution française (1789), quand les esclaves de l'île sonnèrent le signal de la révolte après le célèbre épisode d'une réunion connue sous le nom du « serment du Bois Caïman », c'est en effet Toussaint Louverture qui a rallié à lui les nombreuses bandes et formé une troupe de plus de 2000 hommes. Suite au vote dans l'allégresse de la première abolition de l'esclavage en février 1794, l'homme avait progressivement installé sur l'île un « pouvoir noir » qui avait abouti à l'adoption d'une constitution coloniale en juillet 1801. Il prit alors le titre de gouverneur général de l'île s'attirant aussitôt l'opposition de Napoléon Bonaparte avec la pression des colons.
Aujourd'hui où tout le monde invoque le ciel, appelant Dieu et tous les saints au secours de l'île, je voudrais ici rappeler l'unique trace du séjour de Toussaint Louverture sur le sol français. Le fort de Joux est le seul lieu où les visiteurs peuvent honorer cette figure noire qui s'est illustrée dans des événements ayant eu un lien étroit avec la Révolution française.
Oui, Toussaint Louverture est un héros de la Révolution française ; ce qui faisait dire au Président François Mitterand, lui rendant hommage dans ce qui fut sa cellule, qu' « il est un des grands hommes de son siècle, il est le symbole de l'émancipation des esclaves noirs mais aussi de l'émancipation de tous ». Aussi, dans le cadre du bicentenaire de la Révolution française, la ville de Pontarlier (Le Comité du bicentenaire et le Conseil général) a édité en 1989 un petit ouvrage en hommage à Toussaint Louverture. Ce petit ouvrage, que j'ai pu acquérir lors d'une visite au fort de Joux au milieu des années 90, reproduit les documents officiels de son incarcération, de son combat contre la maladie, ainsi que les différentes représentations qui ont été faites de lui en Europe au 19 è siècle, et un rappel de son combat dans son île à l'avènement de la Révolution française.
Raphaël ADJOBI
°J'aurais tagué Gangoueus, Liss et Caroline K. ; mais tous trois ont déjà parlé de Haïti. Je me pose une question : que devient le blogueur haïtien Roody Edmé ?
Auteur : Roland Lambalot (conservateur du musée de Joux)
Editeur : Office du tourisme de Pontarlier (1989)