Lectures, analyses et réflexions de Raphaël

Vous trouverez ici des comptes rendus de lectures livresques concernant essentiellement l'histoire des Noirs d'Afrique et celle des Afrodescendants des Amériques et d'Europe. Les actualités de la diaspora africaine ne sont pas oubliées.

08 mai 2010

La crise grecque : un parfum de sous-développement

                       La crise grecque :

        un parfum de sous-développement

            Depuis 2008 que le monde entier a sombré dans la crise dévoilant au grand jour les méfaits du capitalisme non contrôlé par les états, l’Union Européenne ressemble à une organisation moins égalitaire. Avec le temps, nous découvrons que certains pays européens ont beaucoup de mal à se relever, montrant un visage presque pitoyable.

Manifestation_en_Gr_ce            A vrai dire, la crise grecque ne fait que montrer une réalité que l’Union Européenne cachait depuis des années sous des apparences de fêtes et de grandes messes vantant l’union sacrée d’une Europe retrouvée. Je ne veux pour preuve que l’état dans lequel se trouvait l’Espagne quand je l’ai découverte en 1977 à sa sortie du Franquisme : un pays arriéré qui vivait sur les vestiges des siècles où elle dominait fièrement le monde mais démuni de tout ce qui faisait alors un pays moderne. La Grèce et le Portugal étaient, à cette époque, logés à la même enseigne. Tels des aristocrates désargentés pointant à l'usine le jour et dormant la nuit dans leur château au confort moyenâgeux, ces grandes puissances des siècles passés vivaient chichement.

            Mais à l'heure de la Communauté Européenne, il fallait absolument hisser ces pays décadents au rang de nations développées. L'Union Européenne avait besoin de s’accorder dans un modernisme tapageur pour rivaliser avec les Etats-Unis et faire pâlir d’envie le reste du monde. Des moyens considérables furent mis en oeuvre pour soutenir leur marche forcée. En quelques années, les blasons redorés, ils reçurent en grande pompe le sacrement sous la forme de l'Euro. Cela rappelait le saut à deux pieds joints dans l’économie mondiale des pays sous-développés d’Afrique, d’Asie et de l’Amérique latine dans les années 70.

            Malheureusement, de la même façon que Le FMI a dû voler au secours des pays sous-développés et hypothéquer leur avenir à partir de la fin des années 80, aujourd’hui la Grèce se voit obligée d’accepter les vieux remèdes propres aux pays pauvres : augmentation des taxes diverses, réduction des salaires, révision des priorités de développement, en d'autres termes l'application du fameux et redoutable « plan d'austérité » synonyme de reconnaissance officielle de sa déchéance dans ce monde où l'argent est roi. Tout cela fragilise le tissu social du pays et le couvre d’une atmosphère digne d’une nation du tiers-monde au fond du trou. Certains veulent croire que le FMI n'est qu'une bouée de sauvetage (apparemment sans effet) en attendant une aide plus conséquente de l'Union Européenne retardée par les échéances électorales en Allemagne. Mais le mal n'est-il pas déjà fait ? En tout cas, si l'U.E ne croit plus en son pouvoir, les Grecs de leur côté ne sont plus séduits par son charme et se réchauffent le coeur comme ils peuvent en brûlant sa bannière étoilée qui, il y a quelques années, leur donnait l'impression d'être un état d'une nouvelle Amérique.

Sauvetage_de_la_Gr_ce            Ce qui arrive à la Grèce et que redoutent le Portugal et l’Espagne n’est-il pas en réalité le sort commun de tous ceux qui vivent au-dessus de leurs moyens ? En tout cas, les investissements colossaux entrepris par ces pays grâce  aux prêts de l’Union Européenne les font apparaître aujourd'hui comme de nouveaux riches en déroute et leur fortune perdue comme un mirage.

Raphaël ADJOBI

Dessin de Wiaz (Nouvelobservateur n°2374 de mai 2010)

Posté par St_Ralph à 17:30 - Actualités Monde - Commentaires [8] - Permalien [#]

Commentaires

  • Ironie du sort !

    Je n'avais pas encore envisagé les choses de cette manière, les médias ne présenteront jamais les choses de cette façon, ils doivent soigner au maximum l'image de l'europe, mais c'est vrai que lorsqu'on observe les faits, et au regard aussi du temps que cela prend (cette crise dure en effet depuis bien longtemps)on a en effet l'impression d'un retournement de situation. Ton billet dessille les yeux.

    Posté par Liss, 09 mai 2010 à 20:08
  • Epave

    Tout comme ce système capitaliste,
    l'Europe n'est qu'une épave qu'on colmate au cours d'une traversée sachant qu'elle va couler.

    Posté par kinzy, 09 mai 2010 à 22:55
  • Comprendre le ras-le-bol d'Athènes

    Ce qui arrive à la Grèce est affligeant, en soi. Il vient rappeler que la " Grande Europe ", celle souhaitée par Schumann, Mitterand, Khol et tant d'autres encore, n'était pas portée par un tréteau économiquement inébranlable. Que tout pouvait se casser la figure. Du jour au lendemain. Surtout quand on offre à des filous, sur un plateau d'or et d'argent, la gestion d'une nation. Ce sont des politiques irresponsables, médiocres, outrageusement inconséquents qui ont hâté la déchéance économique de cette cité éternelle de la démocratie. Ils ont truqué les chiffres, pillé les deniers, fourvoyé l'Europe de Bruxelles devenue myope et sourde. C'est pourquoi, je comprends aisément, et définitivement, le ras-le-bol qui se lève dans les rues d'Athènes. On veut imposer l'austérité au peuple, à ceux dont l'innoncence est immense (...) L'éthique doit toujours être l'amie du politique. Quel qu'en soit le prix.

    Posté par Guillaume Camara, 10 mai 2010 à 01:05
  • Un autre regard

    @ Liss,
    Il est souvent bon de lire un autre point de vue sur les problèmes d'actualité, un autre regard ou simplement une impression. Les journaux sont souvent trop uniformes et leur traitement souvent trop technique des problèmes nous éloigne de le réalité. Je me réjouis de savoir que mon billet t'as permis de voir la crise grecque sous un angle différent.

    @ Kinzy,
    Depuis que la France parle elle aussi de "rigueur", je commence moi aussi à avoir cette impression.

    @ Guillaume,
    Oui, dans cette histoire, on peut aussi parler de tromperie. Les financiers jouent avec l'argent du contribuable. Et quand les problèmes surviennent, on demande au peuple de se serrer la ceinture. Quelle injustice !

    Posté par St-Ralph, 10 mai 2010 à 09:23
  • Voilà ce qui arrive quand on dépense de l'argent que l'on n'a pas. Pour leur plus grand malheur les grecs vont découvrir les "joies" des programmes d'austérité du FMI. Je leur souhaite bien du courage. L'Europe s'est pressé pour instituer l'EURO alors qu'elle n'était pas prête. L'histoire de la grenouille qui voulait se faire plus grosse que le boeuf... J'espère que nos dirigeants en tireront des leçons.

    Posté par Jimmy Joe, 13 mai 2010 à 22:47
  • L'utopique égalité

    St Ralph,

    Tout ce que j'entends dans les médias est bien trop technique pour arriver à mon petit cerveau. Par contre, je n'ai jamais cru à l'égalité au sein de l'union européenne, eux non plus, la preuve, il existe un terme pour désigner les pays les plus pauvres de l'union, une anagramme faite de leurs initiales. Avec ou sans crise, j'ai tendance à croire que cette baudruche aurait fini par exploser quand même, on ne peut s'endetter impunément, c'est valable pour nous autres et c'est la même chose pour les états, en même temps, je dis çà, mais... comme je ne suis pas une experte, je dois être à côté de la plaque.

    Caroline

    Posté par Caroline.K, 28 mai 2010 à 04:14
  • Pas du tout !

    Tu n'es absolument pas à côté de la plaque ! tout ce que nous entendons tous les jours à la radio confirme cette analyse. La semaine dernière, j'ai entendu à la radio un économiste dire que l'Euro était fait pour une économie du type allemand et non point pour une économie du type grec ! Cela veut clairement dire qu'il y a eu erreur d'appréciatiation et que certains pays n'avaient pas la stature pour suivre le rytme imprimé par l'Euro.

    Posté par St-Ralph, 28 mai 2010 à 07:25
  • Pas un peu facile ?

    St Ralph,

    Comme souvent, j'ai mille questions qui me viennent mais... pas de réponse forcément ou alors des hypothèses qui me donnent mal au crâne, alors...

    Pas la stature... ? Pas fait pour... ? Mais je croyais qu'il y'avait comme des évaluations à l'entrée et qu'en plus, pour ceux qui étaient à la traîne, il était question de les hisser au niveau des autres, pour justement éviter ce genre de problème ?

    Du coup je me demande, si finalement, tout n'est pas fait pour que le système soit en permanence en déséquilibre, pour que le moment venu, il y'ait toujours une brebis galeuse à sacrifier, pour que les autres avancent.

    Oui, oui je sais, c'est totalement farfelu ce que je dis, mais en même temps quand j'entends qu'on prête à des taux d'usuriers précisément et plus volontiers à des gens qu'on sait quasiment insolvables, y'a de quoi se poser des questions, non ?

    Caro

    Posté par Caroline.K, 01 juin 2010 à 12:21

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