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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
28 février 2012

Les Afro-Français et la tentation du vote Front National ; la position du MAF

     Les Afro-français et la tentation du vote FN

                                 La position du MAF* 

numérisation0007            Depuis le début de l'année 2012, exaspérés par le mutisme des candidats à la présidentielle sur les questions qui les touchent de près, les Afro-Africains semblent gagnés par une fièvre de sympathie pour le Front national (FN). Les témoignages qui fusaient çà et là ont fini par ébranler quelque peu les esprits au point de menacer l'efficacité d'un éventuel appel au vote unitaire que le MAF compte proposer à ses membres. 

            Visiblement, les Afro-Africains n'apprécient guère de voir leur sort assimilé à celui des immigrés de tous les horizons. En couvrant leurs préoccupations d'un mutisme coupable ou en les confondant avec d'autres, les hommes politiques ont laissé le champ libre aux vieux démons de la France qui surgissent à chaque échéance électorale de grande envergure. Partout, il n'est plus question que d'immigrés et de civilisation supérieure. Une façon très claire de clamer le péril de la maison France-gauloise-blanche. Les ennemis, ce sont tous les autres qui ne sont ni Blancs, ni gaulois ; donc les Afro-Français. Devant l'amplification de cette atmosphère malsaine, seule la voix de François Bayrou a tonné pour dire clairement qu'il y a des limites que l'on ne saurait franchir en cette terre de France sans conséquence grave. Les autres se sont contenté de murmurer du bout des lèvres quelques sons inaudibles. 

            D’autre part, la politique africaine de la France étant complètement exclue du débat des présidentielles – ce qui occulte par voie de conséquence les manquements dont la France s’est rendue coupable en Côte d’Ivoire et en Libye –, de nombreux Afro-français se souviennent que Marine Le Pen a été la seule responsable politique à dénoncer, dès les premières heures, l’acharnement des Européens sur Laurent Gbagbo et Mouammar Kadhafi. Le premier est en prison dans l'indifférence générale des autres partis politiques. Ils n'oublient pas que leurs parents, grands-parents et arrière-grands-parents sont victimes de la politique de leur pays. Ils n'oublient pas que leurs impôts entretiennent des armées qui tuent leur passé. 

            Voilà donc les motivations d'une sympathie assez singulière qui pourrait menacer la belle cohésion que tente d'instaurer le jeune Mouvement des Africains-Français pour peser dans le choix du futur président. Pour éviter la dispersion des voix de ses membres, le MAF a décidé
de décortiquer, semaine après semaine, le programme des différents candidats afin de ne retenir que celui qui défend le mieux ses intérêts. En réalité, il semble que cette longue consultation, qui a commencé le 11 février dernier par le programme du FN, a pour seul but de dissuader les Noirs de France à apporter leur vote à Marine Le Pen. Pour le MAF, il ne faut en aucun cas laisser croire que le Front National détient la solution des Noirs en France.

                           Le programme antichrétien du FN        

            Voter pour Marine Le Pen et son programme, clame le MAF, c’est accepter que les enfants des immigrés n’aient plus la nationalité française ; pour être Français, il faudra être de parents français. C’est ce que l’on appelle le droit du sang par opposition au droit du sol. A première vue, cela n'est pas une mesure dramatique. Mais ceci entraînant cela, le programme stipule qu'un enfant d’immigré n’aura plus le droit à la scolarisation en France. D’autre part, un malade immigré n’aura pas le droit de bénéficier des soins dans les mêmes conditions qu’un Français. Le FN estime même nécessaire de libérer les logements à loyer modérés (HLM) occupés par les immigrés pour loger les Blancs. Un programme que le MAF juge antichrétien dans un pays qui se dit attaché aux valeurs chrétiennes. 

            Si le MAF continue l’analyse des différents programmes des candidat avant d’arrêter de manière définitive le choix du candidat pour lequel les membres devront voter tous « d’une même voix » (comme le dit le mot de ralliement), tout porte à croire que François Hollande a les faveurs du Mouvement malgré ses prises de positions malheureuses à l’égard de Laurent Gbagbo. Il faut reconnaître que le parti socialiste français et l’Internationale Socialiste ont brillé par leur absence dans la défense du camarade Laurent Gbagbo, quand ils ne lui ont pas jeté la pierre. Il n'est pas dit non plus que le parti socialiste répondra aux attentes du MAF, ni qu'il fera plus de places aux minorités dans sa sphère politique. Mais le Mouvement laisse croire que l'aventure mérite d'être tentée avec François Hollande. De même que l'on a tout intérêt à choisir son adversaire quand on le peut, il est judicieux de choisir comme coéquipier celui qui a une inclination naturelle à nous écouter. 

                 Le MAF en congrès le 14 Avril 2012. Et après ?   

            Pour réussir son opération de positionnement dans le débat avec les partis politiques et le futur pouvoir de notre pays, Calixthe Beyala, le fer de lance du  MAF, mise sur un grand succès du premier congrès national du Mouvement qui aura lieu le 14 avril 2012, à 13 heures, au Palais des Congrès de Paris. De toute évidence, ce congrès est de la plus haute importance. Il témoignera publiquement de la capacité de mobilisation du Mouvement. Mais il sera surtout le premier signe de sa visibilité dans le paysage politique français.           

            La présidente du Mouvement qui se plaît à critiquer les marches de protestation ou de soutien, prend paradoxalement conscience qu'un congrès rassembleur est une façon à la fois de faire du bruit et montrer sa force. C'est aussi une façon de signifier aux autres que l'on existe et que l'on a des préoccupations à faire connaître ou à défendre. Elle sait, comme de nombreux membres du MAF, qu'il ne faut en aucun cas rater ce rendez-vous en se retrouvant en petit comité le 14 avril 2012. Une maigre assistance serait le signe d'un échec qui effacerait le Mouvement non seulement de l'esprit des candidats mais encore de la scène politique à laquelle il veut accéder. 

            Certes, le Mouvement a des faiblesses très criantes. D'abord, il y a une réelle absence de définition claire du MAF. Tantôt on parle de lobby qui ne saurait se permettre de faire descendre ses membres dans les rues pour crier son indignation à la manière d'un quelconque groupe de soutien ; tantôt le Mouvement est présenté comme un parti politique. Si tel est le cas, alors Calixthe Beyala doit savoir qu'appeler à manifester ou à apporter son soutien à des mouvements de protestation n'est pas incompatible avec les desseins d'un parti politique. Que doit être le MAF ? Un mouvement de salon (sans les moyens financiers d'un lobby) ou un mouvement populaire capable d'exprimer publiquement son humeur devant les événements qui portent atteinte à ses valeurs ? Il faudra choisir au plus vite !   

            D'autre part, le MAF n'existe que par le nombre de ses adhérents. Rien d'autre ! Dans la pratique, nous n'avons pas connaissance de l'existence d'un bureau national provisoire. Il n'existe pas de section ou de représentation du Mouvement à l'intérieur du pays, mis à part à Lille. Tous ceux qui ont plaidé pour la création de différentes sections dans les grandes villes afin de rapprocher le Mouvement et ses instructions de ses membres ont vu ce projet écarté par Calixthe Beyala. Aussi, il est impossible aux adhérents ne vivant pas à Paris ou à Lille de se connaître et de tenir des réunions loin des yeux de sa présidente. Il est à craindre que l'absence de contact entre les membres et le manque d'action n'éteignent les ardeurs des premières heures de la naissance du Mouvement. La tentation du vote FN ne s'expliquerait-elle pas aussi par ce manque d'activité et d'implication directe des membres du MAF au sein de leur Mouvement ? Cela demande réflexion. 

            Cette remarque nous mène à la dernière grande faiblesse du MAF : la communication ! Il existe bien un site du Mouvement. Mais il ne semble pas destiné à communiquer avec les adhérents : pas de compte rendu des réunions parisiennes ; les questions posées par ce biais restent sans réponse (je l'ai testé !) ; les membres qui n'assistent pas aux réunions parisiennes avec Calixthe Beyala demeurent dans l'ignorance totale de ce qui se dit et se fait au sommet du MAF. Les SMS laconiques ne peuvent en aucun cas constituer le seul moyen de communication. A qui la faute si l'adhérent qui ne connaît pas de section locale n'est pas informé des actions et des prises de position de son mouvement ?     

            Enfin, combien sommes-nous ? Combien d'adhérents le Mouvement compte-t-il dans les grandes villes ? Personne ne le sait. Ni sur le site du MAF ni par les SMS les adhérents ne sont tenus au courant de leur importance en chiffres ! Faut-il attendre que les journaux et les chaînes de télévision le leur apprennent ? 

            Beaucoup de choses restent à faire. Mieux, tout reste à faire pour que le MAF - qui a fait naître tant d'espoir - ait des chances de poursuivre cette aventure au-delà du congrès du mois d'avril 2012. Il ne faut donc pas désespérer malgré ses manquements et son excessive centralisation qui le prive d'une base dynamique. Le fer de la lance du chasseur a beau briller, si le manche n'est pas solidement tenu par le bras du chasseur, et si celui-ci n'a pas les pieds suffisamment agiles pour le porter, la proie ne vivra que des frayeurs inutiles. Le MAF doit donc veiller à construire ses bases afin d'exister non pas seulement par son porte-parole mais par l'ensemble de ses membres actifs. Quand ceux-ci seront dans la capacité de mener des actions partout en France où les valeurs qu'ils défendent seront menacées, alors l'aventure se poursuivra. Il ne faut pas que l'on puisse dire demain : un seul être quitte le MAF et le Mouvement est réduit à rien !

            Le temps viendra où, en famille (politique), il faudra trouver les idées pour structurer et dynamiser le Mouvement. Mais pour l'heure, il est urgent de réussir ce premier congrès. Chacun doit se sentir concerné et faire le déplacement afin d'assurer son succès. Une présence massive des Africains-Français pourrait ébranler certains esprits politiques et faire évoluer les choses dans le sens de nos convictions. Il faut y penser sérieusement !   

*MAF : Mouvement des Africains-Français

Raphaël ADJOBI

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