13 janvier 2021
Trop de Raphaël ADJOBI en Côte d'Ivoire : une histoire d'usurpation d'identité (Raphaël ADJOBI)
Trop de Raphaël ADJOBI en Côte d’Ivoire :
une histoire d’usurpation d’identité
Jusqu’à la fin des années 1990, Bonoua était une commune où presque tous les jeunes se connaissaient. J’étais indiscutablement le seul Raphaël ADJOBI connu dans cette ville. Donc normalement, il ne peut exister sur cette terre deux Raphaël ADJOBI né à Bonoua et ayant plus de 55 ans ! Mais chose extraordinaire, aujourd’hui, il y a une dizaine de Raphaël ADJOBI dans le monde ayant à peu près mon âge – au regard de leur physique repéré sur Internet (4 aux Etats-Unis !).
De l’ethnie abouré, le nom ADJOBI est déjà rare. Cette ethnie peuple les villes de Bonoua et Bassam, et les villages de Moossou, Yahou, Adiaho, Ebra et Vitré. Tous mes amis qui ont fait leur scolarité à Bassam m’assurent n’avoir jamais connu un autre Raphaël ADJOBI. D’ailleurs, le prénom Raphaël était aussi très rare en Côte d’Ivoire, à mon époque. Mis à part l’ancien ambassadeur français Jacques Raphaël Leygues et un camarade de classe en sixième, durant toutes mes années passées en Côte d’Ivoire, jamais je n’ai rencontré et n’ai entendu parler d’un autre Raphaël. Comment est-il donc possible de trouver aujourd’hui une dizaine d’Ivoiriens s’appelant Raphaël ADJOBI et ayant à peu près mon âge ? C’est cette question sans réponse qui justifie ce billet. Mais j’ai des raisons personnelles de m’inquiéter et soupçonner certains d’usurpation d’identité.
En 1978, après deux années d’études en France, je bénéficie d’un billet de vacances en Côte d’Ivoire. Je profite de l’occasion pour aller retirer l’original de mon diplôme de baccalauréat qui m’était exigé pour une inscription à l’université d’Abidjan. En effet, j’avais alors la ferme intention de poursuivre en Côte d’Ivoire mes études de lettres modernes que je menais en France parallèlement à celles de l’espagnol.
Parce que je bénéficiais toujours de ma bourse pour mes études en espagnol en France, et aussi parce que la fin de validité de mon billet approchait, j’ai finalement pris la décision de rentrer en France ; mais sans prendre la peine d’aller retirer mon dossier d’inscription à l’université d’Abidjan. Depuis cette date, j’étais certain de trouver en Côte d’Ivoire plusieurs personnes – physiquement proche de mon âge - portant le même nom et le même prénom que moi. Le vol de diplôme ainsi que la falsification des actes de naissance sont choses courantes en Côte d’Ivoire (et dans un autre pays réputé que je ne nommerai pas). Et immanquablement, ce qui était attendu est arrivé.
Retenez que si vous connaissez un autre Raphaël ADJOBI que moi né le 10 mai à Bonoua, c’est une preuve indubitable que c’est un usurpateur. (Cliquez sur ma photo pour m’écrire)
Si vous connaissez un autre Raphaël ADJOBI ayant obtenu son baccalauréat en Côte d’Ivoire en 1976, c’est sûrement un usurpateur. (Cliquez sur ma photo pour m’écrire).
Une chose est certaine, tous ceux qui ont changé de nom sont connus dans leur famille, dans leur village et parmi leurs connaissances. Changer de nom et prénom à l’âge adulte, cela ne peut pas se cacher trop longtemps. Les gens finissent par se poser des questions. Si vous volez un diplôme de baccalauréat, personne ne peut dire qu’il a été votre camarade de classe dans le primaire, au collège ou au lycée. Testez tous les Raphaël ADJOBI autour de vous et vous verrez. Commencez par leur demander leur date de naissance et l'année d'obtention de leur baccalauréat et vous verrez leur comportement. Il n'y a pas deux Raphaël ADJOBI ayant obtenu le bac en 1976 !
Mon parcours scolaire est le suivant : collège Voltaire - collège saint-Simon - Collège de Cocody - Lycée classique d'Abidjan. Si vous avez connu un camarade de classe qui s’appelait aussi Raphaël ADJOBI, dites-moi dans quel établissement et en quelle année. Merci. (Cliquez sur ma photo pour m’écrire).
° Vous vous appelez aussi Raphaël ADJOBI, vous devez m'aider à éclaircir le problème. Vous avez le devoir de vous poser des questions.
07 novembre 2020
Des barricades pour aider à l'installation d'un gouvernement de transition en Côte d'Ivoire (Raphaël ADJOBI)
Des barricades pour aider à l’installation
d’un gouvernement de transition en Côte d’Ivoire
Grâce à la désobéissance civile, les populations ivoiriennes ont réussi à rendre non-crédible le résultat des élections présidentielles du 31 octobre 2020. L’illégitimité de celui qui est déclaré élu est attestée sur le plan national et international. Cependant, depuis l’annonce de la mise en place du Conseil national de transition (CNT) avec à sa tête l’ancien président Henri Konan Bédié – doyen des hommes politiques – la fièvre de la désobéissance civile est retombée comme si le peuple avait vaincu le dictateur Alassane Ouattara. Et pourtant, il suffit de regarder la Côte d’Ivoire pour constater que derrière ce calme apparent plein d’espoir en l'avenir du CNT, c’est l’ancien gouvernement qui garde la main sur les institutions et les affaires du pays. Ce qui lui permet de continuer à emprisonner impunément ses adversaires d'hier comme s’il n’y a rien de nouveau sous le ciel de la Côte d’Ivoire.
Force est donc de constater qu’il ne suffit pas de créer un Conseil de transition pour gagner la guerre contre un dictateur. Il faut des stratégies fortes pour faire basculer les institutions de son côté. Qu’avaient prévu les membres du CNT dans le cas où le pouvoir illégitime se maintiendrait ? Apparemment rien. Quelques membres emprisonnés ou assignés à résidence ont suffi pour réduire ce nouvel organe politique à l’inaction. Nous voilà revenus à notre point de départ. Henri Konan Bédié et ses amis croyaient-ils peut-être que pour leurs beaux yeux les présidents des institutions et les commandants des armées viendraient à leurs pieds faire allégeance ? Une chose est certaine : si le calme semblable à une lassitude maladive dans laquelle semble désormais se complaire les Ivoiriens persiste, si ceux-ci n’ont pour seul objectif que la reprise immédiate de leurs activités, alors chacun peut être certain qu’il est condamné à supporter la dictature actuelle jusqu’à la mort d’Alassane Ouattara ! Oui, si une stratégie efficace n’est pas mise en place pour étouffer son pouvoir, il n’aura aucune raison de le céder.
Monsieur Mamadou Koulibali, président de Lider, a tort de dire qu’il ne lui appartient pas de donner de mot d’ordre aux Ivoiriens. Il a tort de ne pas suivre l’exemple de Laurent Gbagbo en 2000 et celui de Charles Blé Goudé en 2004. Il semble avoir vite oublié que c’est le mot d’ordre de désobéissance civile lancé par Henri Konan Bédié qui a contribué à rendre illégitime le résultat des élections du 31 octobre dernier. On ne fait pas une révolution avec des leçons de morale. On peut ne pas crier des mots d’ordre sur tous les toits, mais on peut et on doit faire parvenir des mots d’ordre à ceux qui agissent sur le terrain. Tout combat suppose des stratégies. Tout leader politique doit être conscient qu’il y a des moments où les populations ont besoin de savoir qui elles doivent suivre et dans quelle direction elles doivent aller. Et aujourd’hui, le moment est favorable pour cela. C’est d’ailleurs ce que Guillaume Soro a bien compris et a tenté de faire malgré les statuts de traître et de bourreau attachés à sa personne depuis plus d'une décennie. Si malgré cette mauvaise réputation beaucoup de ses compatriotes ont écouté son appel, c’est parce qu’il s’est toujours vanté de posséder une armée qui lui obéirait au doigt et à l’oeil. Malheureusement pour lui, Alassane Ouattara n’est pas novice dans l’art de la traîtrise et sait parfaitement comment se comporter avec les traîtres. Aux dires du commandant Abdoulaye Fofana, Ouattara a pris soin de corrompre tous les hauts responsables de l’armée ; une armée qui avait d’ailleurs reconnu, avant la crise post-électorale de 2010, qu’elle était financée par le chef du RDR. Ouattara a donc pour ainsi dire miné le terrain sur lequel comptait Guillaume Soro pour rebondir.
A vrai dire, Guillaume Soro est un fanfaron. Il n’a jamais eu d’armée en Côte d’Ivoire. Si aux yeux des Ivoiriens il est coupable de crimes de guerre au même titre que les rebelles d’hier, c’est parce qu’il fut leur porte-parole auprès de l’opinion publique nationale et internationale. D’autre part, il était le paravent officiel d’Alassanou Ouattara qui ne voulait pas à l’époque apparaître comme le commanditaire et le bénéficiaire de la rébellion. Ainsi, à force de jouer le porte-parole et le paravent, Guillaume Soro, alors chargé de serrer les mains des Blancs et insulter Laurent Gbagbo sur les chaînes de radio et de télévision, a fini par se convaincre qu’il est le chef de l’armée qui a aidé Ouattara à parvenir au pouvoir avec le précieux concours des Français. En réalité, il n’en était que le bonimenteur ! Si Guillaume Soro avait une armée, celle-ci ne serait pas restée sans quelques remous lorsqu’il a été débarqué du perchoir de l’Assemblée nationale et surtout lorsqu’il a été contraint à l’exil d’une manière peu élégante. Retenons que Guillaume Soro s’agite pour que demain, si l’armée bascule du côté du Conseil de transition, il puisse s’en attribuer la gloire, à la manière de la mouche du coche de Jean de La Fontaine. D’ailleurs, les médias français qui donnent beaucoup d’importance à son récent appel aux Ivoiriens, allant même jusqu’à le comparer à celui de Charles de Gaulle le 18 juin 1940, doivent nous inciter à la méfiance. La France aimerait sûrement garder son cheval de Troie pour la sécurité de ses affaires. Prenons donc soin de ne pas participer à l’exagération de la portée des boniments de Guillaume Soro sur les événements en cours en Côte d’Ivoire. Sachons tout simplement que tous les éléments de l’armée ne sont pas fidèles à Ouattara, tous ne sont pas des ressortissants des pays voisins. Nous pouvons donc aider ces éléments-là à agir en nous aidant nous-mêmes.
Le deuxième acte de la désobéissance civile maintenant !
Pour triompher de la dictature ouattariste, quel moyen reste-t-il finalement aux Ivoiriens ? Des barricades ! Oui, de vraies barricades, solides comme durant les révolutions européennes des siècles passés, pour étouffer Abidjan et la pousser à la révolte populaire ! Je l’ai dit et le redis ici : dans une démocratie, les manifestations publiques visent avant tout à attirer l’attention des autorités de l’État sur une situation sociale ou politique qui exige une réponse satisfaisante. Malheureusement, on n’obtient rien en agissant ainsi avec une dictature ; à moins que plusieurs milliers de personnes envahissent la capitale et la paralysent durant plusieurs semaines pour obliger le dictateur à céder le pouvoir. Un tel cas de figure n’est pas envisageable avec l’esprit actuel des Ivoiriens dominés par la peur et l’égoïsme de ceux qui ne se sentent plus assez jeunes pour descendre dans les rues. Il reste donc aux Ivoiriens à dresser des barricades à l’entrée et à la sortie de chaque ville, de chaque village, de chaque quartier pour entraver le mouvement des populations. Ainsi, tous les fonctionnaires auront des raisons de ne pas aller travailler, tous les fournisseurs auront des raisons de ne pas alimenter les marchés, les magasins et le port d’Abidjan. Une organisation qui étouffera économiquement le marché national et arrêtera les exportations vers l'Europe. Et quand les Français n’auront plus les matières premières qui font tourner leurs usines et permettent aux ouvriers de garder leur emploi, eh bien, la France - hier grand ami d’Alassane Ouattara mais aujourd’hui silencieuse - sera bien obligée de lui dire : la France n’a pas d’ami ; elle n’a que des intérêts ! Et Monsieur Ouattara sait bien ce qu’il en coûte d’entraver les intérêts de la France.
Il faut donc que chaque ville, chaque village et les quartiers ou agglomérations d’Abidjan érigent des barricades solides en signe de protestation pour un changement radical de régime en Côte d’Ivoire. Pour réussir, cette action doit commencer partout en même temps ! Il n’est pas question de retomber dans les huit années de négociations du régime de Laurent Gbagbo avec les rebelles de Ouattara. On ne négocie pas avec un régime de traîtres et d’égoïstes sans foi ni loi. Il faut prendre le risque de sauver l’avenir de nos enfants, de notre famille plutôt que de le laisser entre les mains d’un dictateur sans parole et sans scrupule qui vit désormais dans la peur d’être jugé et condamné par les Ivoiriens. N’acceptons pas que cet homme fasse de la côte d’ivoire et de chacun de nous ce qu’il veut. C’est désormais la nouvelle forme que doit prendre la désobéissance civile jusqu’à ce que la France qui a placé Ouattara à la tête de la Côte d’Ivoire comprenne qu’il est usé à force de mal servir sa préfecture.
Je voudrais pour terminer adresser cette pensée de Henry David Thoreau (1817 – 1862) – auteur de La désobéissance civile – à tous les présidents des institutions ivoiriennes et surtout aux commandants des armées de côte d’Ivoire : puisque la machine du gouvernement « est d’une nature telle qu’elle vous oblige à vous faire l’agent d’une injustice à l’égard d’autrui, il faut enfreindre la loi et faire de votre vie une contre-friction pour gripper la machine ».
Raphaël ADJOBI
03 novembre 2020
Un Conseil de transition en Côte d'Ivoire : l'occasion pour Henri Konan Bédié de sauver son honneur (Raphaël ADJOBI)
Henri Konan Bédié : enfin l’occasion de sauver
son honneur avant de tirer sa révérence
Le 2 novembre 2020, devant la vacance du pouvoir résultant de la parodie d’élections organisées par Alassane Ouattara à laquelle il a participé en toute illégalité – selon ses propres discours et ceux des magistrats qui l’ont accompagné durant ses mandats – un conseil de transition est né en Côte d’Ivoire. En effet, aucun pays sur cette terre ne peut se permettre de saluer la victoire de Monsieur Alassane Ouattara au regard de la désobéissance civile des populations comme preuve du rejet définitif de sa personne et de son pouvoir. Désormais, la parole de cet homme ne vaut plus rien sur la scène nationale et internationale.
Monsieur Henri Konan Bédié est donc devenu en ce début du mois de novembre 2020, la figure de proue d’une nouvelle équipe pour une nouvelle ère attendue depuis le coup d’État Français d’avril 2011 ; coup d’État ayant installé Alassane Ouattara à la tête de ce pays d’Afrique occidentale. Si la figure d’Henri Konan Bédié demeure encore une référence en Côte d’Ivoire, il est indéniable que cela tient à son âge qui, sur la terre africaine, confère de la considération si on sait la mériter. Et si les partis de l’opposition l’ont choisi pour incarner la nouvelle voie à suivre, c’est effectivement parce que qu’il ne s’est pas comporté durant ces dernières années comme un vieil homme sénile mais plutôt comme celui qui regardait et écoutait afin de pouvoir agir le moment venu.
Et pourtant, cet homme a contribué aux malheurs de la Côte d’ivoire de la plus belle des façons. Arrivé en deuxième position lors des élections présidentielles de 2010, Henri Konan Bédié a cédé sa place à Allassane Ouattara à la demande de la France afin que celui-ci puise affronter Laurent Gbagbo et avoir l’occasion de lui contester la victoire finale. Ce qui s’est effectivement produit. Pire, il a signé un pacte oral avec celui qu’il a contribué à faire roi dans le but d’occuper le fauteuil présidentiel l’un après l’autre. Trahi par Alassane Ouattara, il est passé aux aveux publics avant de se murer dans le silence en vieil homme humilié. C’est donc l’homme que toute la Côte d’Ivoire maudissait. Houphouët-Boigny a fini sa vie en vieil homme sénile à qui il a fallu arracher le multipartisme, un vieil homme qui a été ruiné par sa maîtresse blanche qui l’a fait cocu avec le premier ministre que la France lui a imposé. Nous nous attendions à ce que Henri Konan Bédié finisse sa vie aussi risible que son aîné Félix Houphouët-Boigny. Pour ma part, dès mars 2012, je m’étais promis d’aller pisser sur sa tombe avec des milliers d’Ivoiriens, à la queue leu leu.
Mais voilà qu’en ce mois de novembre 2020 une occasion extraordinaire se présente à lui pour sauver son honneur et par la même occasion celui de son pays ! Ni Houphouët-Boigny, ni Robert Guéi, ni Alassane Ouattara n’ont saisi l’occasion qui leur était offerte de vivre en supervisant de leur renommée et autorité les institutions de la Côte d’ivoire pour une évolution pacifique et harmonieuse. L’orgueil et la cupidité ont souillé à jamais leur nom ! Aujourd’hui, Henri Konan Bédié a cette chance extraordinaire de se montrer plus grand que ses trois devanciers. S’il réussit cette transition de la côte d’ivoire vers une réconciliation nationale et le strict respect des institutions, alors il entrera dans l’histoire de son pays par la grande porte. Durant le restant de ses jours, sans être le gouvernant, il sera considéré par les Ivoiriens comme celui par qui la paix est revenue dans le pays. Nous espérons vivement qu’il saura s'appuyer sur son autorité d’aîné pour rassembler les Ivoiriens, que la sagesse que nous reconnaissons aux anciens installés sur la terre de leurs ancêtres sera son propre guide pour apaiser le coeur de ses compatriotes. Nous espérons - si l'armée lui tend la main - qu’il saura tirer profit de l’unanimité dont il jouit aujourd’hui pour jouer le rôle du guide discret qui, dans l’ombre, inspire les gouvernants. Plus clairement, nous attendons de lui qu’il veille à la bonne organisation des élections ainsi que la mise en place des moyens d’une réconciliation vraie des Ivoiriens après le retour de tous les exilés. Nous attendons de lui qu’il ne fasse pas du pouvoir présidentiel un objectif personnel mais plutôt qu’il incarne pour tous celui qui indique la voie. Nous nous attendons à ce qu’il se comporte comme Moïse : qu’il ne s’aventure pas sur la Terre promise ! Mais, comme un artiste, qu’il prenne ses distances pour enfin admirer sa dernière œuvre qui mène à la paix nationale. Des élections présidentielles supervisées par une autorité ou des autorités nationales respectées seraient une grande première en Afrique francophone.
Raphaël ADJOBI
19 octobre 2020
Comment Alassane Ouattara a préparé la Côte d'Ivoire à des lendemains douloureux (J. Katinan Koné / Raphaël ADJOBI)
Justin Katinan KONE explique la manipulation des
populations du Nord et celles de la CEDEAO
par Alassane Ouattara
Justin Katinan Koné, ancien ministre de Laurent Gbagbo exilé au Ghana, est originaire du Nord de la Côte d’ivoire ; cette région de son pays dont les populations ont été présentées durant des décennies par Alassane Ouattara, la France et les pays du Sahel comme détestées et maltraitées par le reste des Ivoiriens. Après les aveux du député Konaté Zié (RDR – parti de Ouattara) en août dernier, lui aussi du Nord - (voir mon article «La Côte d’Ivoire en 2020 : le bilan politique sans perspective de Ouattara) – Justin Katinan Koné vient confirmer ce que Mamadou Koulibaly et Laurent Dona Fologo n’ont jamais présenté comme le principal problème de la Côte d’Ivoire dans les années à venir : la réconciliation des Ivoiriens après bientôt dix ans de confiscation de toutes les structures institutionnelles et administratives de la Côte d’Ivoire par les Nordistes et les populations issues des pays de la CEDEAO avec lesquelles ils ont créé des villages nordistes au sud du pays – et parfois même au sein des villes du Sud. Si la majorité des Ivoiriens parvient à chasser Alassane Ouattara du pouvoir malgré ses nombreux partisans nordistes, la réconciliation nationale passera forcément par l’éradication des traces du rattrapage ethnique. Quand on construit un pays sur la base d’un mensonge, on le prépare à des lendemains douloureux. Il faudra donc beaucoup de volonté et du courage aux Ivoiriens pour laver leur linge sale en famille ! Quand on lit l'ancien ministre de Laurent Gbagbo, fils du Nord du pays, tout est clair.
Pourquoi la communauté étrangère de la CEDEAO doit s’associer
au mot d’ordre de désobéissance civile
Toute la logique de conquête et de conservation du pouvoir de monsieur Ouattara et de son clan repose sur deux piliers. La régionalisation du pouvoir d’Etat et l’instrumentalisation de l’épineuse question des nombreux ressortissants de la CEDEAO, notamment la communauté Burkinabée et malienne.
Tout le monde se souvient des propos tenus par Ouattara, au cours d’une interview, lors de son tout premier voyage officiel en France en 2011. L’on se rappelle en effet qu’il justifiait la prééminence qu’il accordait aux cadres du Nord dans son administration par le fait qu’il s’était fait le devoir de faire rattraper le retard accusé par ces derniers du fait de leur exclusion de l’Etat par les régimes précédents. J’avais dénoncé en son temps cette vision extrêmement dangereuse pour la nation et pour l’Etat. J’avais même prévenu que les dernières et grandes victimes de ce nouveau mode de gestion du pouvoir d’Etat seraient nous, les ressortissants du nord. En effet, le risque était grand qu’une telle manipulation malicieuse de nos ressentiments réels ou suggérés n’incline nos esprits vers les réflexes de tribu assiégée qui aurait besoin, pour sa survie, d’une sentinelle ou d’un Robin des Bois. Une telle muraille érigée dans notre conscience nous séparerait définitivement du reste du pays et, une fois constitué en corps captif pour la conservation ou la conquête du pouvoir de monsieur Ouattara, les ambitions contradictoires au sein de la tribu porteraient l’estocade au Nord. Malheureusement la suite des évènements semble corroborer mes inquiétudes. Le décès du Premier Ministre Amadou Gon Coulibaly, la guéguerre mortelle entre messieurs Ouattara et Soro Guillaume, les nombreuses défections des autres cadres des autres régions du pays, anciens compagnons parfois de longue date de monsieur Ouattara découlent tous d’une seule et même source : la régionalisation du pouvoir d’Etat.
Dans les faits, l’apologie de l’ethnicisme s’est opérée au RDR à partir des années 95. L’aile centriste, proche de la gauche, qui avait rompu avec le PDCI pour se muer en parti politique, a été très vite débordée par l’orientation ethnique et régionaliste qui a été donnée à ce groupement politique quelques instants avant le décès de Djeni Kobena. Ainsi, ont très vite disparu des sphères de décision, entre autres, Alexandre Ayé, Badaubré, Jacqueline Oble, Grah Claire, Hyacinthe Leroux, etc. Une fois l’épuration régionaliste achevée, au sein même de la famille régionale, il y a eu une sorte d’épuration de tout ce qui était de nature, intellectuellement parlant, à faire ombrage à Ouattara qui se voulait l’unique étoile brillante dans le ciel du RDR. Des brillants cadres du nord ont été poussés d’abord vers la périphérie du centre décision avant de s’éteindre définitivement. Aussi, tous ceux qui étaient capables de nourrir aussi des ambitions présidentielles ont-ils été écartés pour faire place nette à l’unique Ouattara. Nul ne sait ce que sont devenus le ministre Adama Coulibaly dit Adama Champion par exemple ou le sociologue Konaté Yacouba. Ben soumahoro est décédé en exil. Il y a très longtemps Zémoko Fofana et Ngolo Coulibaly sont réduits à jouir d’une retraite dorée qui les tient très loin des centres de décision. L’épuration de l’élite intellectuelle a fait place nette à la force brute et à la brutalité politique qui porteront Ouattara au pouvoir et il compte, bien entendu, sur cette brutalité pour préserver ce pouvoir. Après avoir éteint toute luminosité au Nord pour être seul maître, il s’en proclame le défenseur exclusif et universel. Cela ne constitue pas pourtant le seul paradoxe de la démarche du Président Ouattara. En 1991, des cadres du nord, se réclamant de lui, écrivent un document sous forme de chartre intitulé "Le Grand Nord en marche ». Ce brulot est un ramassis de récriminations contre le pouvoir central. Il fait ressortir un ensemble de ressentiments liés à des frustrations qu’auraient subies les populations du Nord écartées de la gestion politique de l’Etat. En 1991, il s’agit bien du bilan du Président Houphouët qui est ainsi attaqué. Parce que ni Bédié, encore moins Gbagbo, n’avaient géré l’Etat au sommet à cette date. Il y a quand même quelque chose d’assez paradoxal de s’affubler, après une telle attaque frontale de la gestion d’Houphouët, le titre d’houphouétiste. En 2011, quand Ouattara affirme, par ses nominations fortement tribalistes, vouloir réparer un tort causé aux nordistes, il fait absolument référence à la Chartre du Nord. Ce faisant, il joue fin même si le jeu est extrêmement dangereux pour la cohésion nationale. Conscient que la voie qu’il a empruntée pour accéder au pouvoir d’Etat lui a coupé la sympathie, et parfois définitivement, d’une grande partie de la population, il a besoin de se créer un bouclier. Il manie deux leviers aux effets convergents. Flatter le nord en lui faisant croire qu’il est effectivement le jouisseur exclusif du pouvoir ; provoquer symétriquement un sentiment de frustration et de révolte des autres populations contre les gens du Nord, de sorte à créer une peur permanente à ceux-ci dont il s’en sert pour renforcer leurs obligations vis-à-vis de lui. Malheureusement, sa manœuvre semble fonctionner. Très peu de nos compatriotes se rendent compte que le niveau de scolarisation bas de nos concitoyens du nord, du fait de l’arrivée tardive de l’école dans nos régions, en font à la fois des cibles privilégiées de toutes les formes d’endoctrinement, religieux et politique. Ouattara joue à fond sur cette réalité. Il appartient aux Ivoiriens de garder la vigilance haute afin de faire la différence nette entre la main qui divise et les victimes de cette division qui s’ignorent. Mais c’est surtout aux populations du Nord de prendre conscience que cette manœuvre de Ouattara est très dangereuse pour elles. C’est un piège mortel duquel nous devons sortir impérativement. Cette victimisation du Nord ne profite finalement qu’à une et une seule personne : Ouattara. Les nominations des cadres du nord dans la haute hiérarchie du pouvoir d’Etat ne date pas de Ouattara. A titre d’exemples, il convient de relever que :
Avant Hamed Bakayoko, il y a eu Nalo Bamba ministre de l’intérieur. Il était du Nord. Avant Doumbia Chef d’État-major, il a eu Thomas d’Aquin et Timité Lassina. Ils étaient du Nord. Avant Soro Guillaume et Soumahoro Amadou Présidents de l’Assemblée Nationale il y a eu Mamadou Koulibaly. Avant KONE Mamadou au Conseil Constitutionnel, il y a eu Nemin Noel de Katiola et Lanzeni Coulibaly à la Cour Suprême. Avant Touré Apalo commandant Supérieur de la Gendarmérie, il y a eu Gaston Ouassénan KONE. Avant Koné Amadou ministre du transport, il y a eu Coulibaly Adama, tous les deux de Korhogo, avant Ly Ramatou présidente de l’université, il y a Tuo Valy, et Touré Bakary, avant Camara à la Sir, il y a eu Tounkara, avant Diaby à la PETROCI, il y a eu Fadiga Kassoum qui est en exil aujourd’hui. Avant KONE Adama au Trésor puis au ministère de l’Economie il y a eu Ngolo Coulibaly et Aboulaye KONE. Avant Kandia Camara à l’éducation nationale, il y a eu Balla Kéita. Avant Cissé Bacongo à l’Enseignement supérieur, il y a eu Saliou Touré. Avant KONE Tiémoko à la BCEAO, il y a eu Fadiga Aboulaye et Alassane Dramane Ouattara. Lamine Diabaté a dirigé la direction nationale de la BCEAO Côte d’Ivoire. Avant Issa Coulibaly Dg des Douanes, il y a Coulibaly Adama et madame Mlanhoro KONE etc. Sarata Touré, Malick Coulibaly, KONE Katinan, Demba Traoré, Amara Touré, Ouattara Gnonzié, Assana Ouattara, Soro Seydou dit Soro coton etc. ont tous été des proches collaborateurs de Laurent GBAGBO. Alors comment opère-t-on pour distinguer entre les bons et les mauvais fils du Nord sans tomber dans la manipulation des consciences.
Il est donc illusoire de faire croire que le salut du Nord se trouve dans la présence continue de Ouattara à la tête de l’Etat. Plus nous soutenons Ouattara dans l’insoutenable, plus nous prenons le risque de servir d’instruments de sa politique de division nationale.
La seconde catégorie de population, sur laquelle Ouattara et le RHDP ont également assis leur stratégie de conquête et de conservation de pouvoir, est composée de la forte communauté des ressortissants de la CEDEAO, notamment Burkinabé, Malienne, Guinéenne et, à un moindre degré, sénégalaise. La gestion de cette communauté, notamment les deux premières composantes citées, constitue un défi majeur pour tous les gouvernements parce que leur présence reste intimement liée à la nature de notre économie. En effet, l’économie cacaoyère, depuis son instauration à la fin du 19ème et début du 20èmesiècle, a attiré une forte population étrangère qui a migré à l’intérieur du pays en suivant le déplacement de la boucle du cacao. De ce point de vue, les villages de Garango, Koudougou, Koupela, Tingodogo, dans les alentours de Bouaflé, sont les répliques du gros village de SAMO. En effet, tout comme celui-ci, ceux-là ont été créés pour répondre au même besoin de main d’œuvre agricole pour l’aristocratie agricole naissante qui n’était pas, déjà à cette époque, exclusivement de la Côte d’Ivoire. Quand Verger créé ses plantations de cacao dans le Sud Comoé, il est imité par certains cadres locaux de l’administration coloniale. Tous ces exploitants ont besoin d’une forte main-d’œuvre que les autochtones Agni et autres ne peuvent leur fournir. Ceux-ci sont même taxés de paresseux comme l’on taxe aujourd’hui les autochtones de l’Ouest. Pour satisfaire leurs énormes besoins en main-d’œuvre, les exploitants agricoles créent un syndicat appelé Syndicat Inter-Agricole de la Main-d’œuvre (SIAMO) qui se charge de recruter la main d’œuvre dans toute la partie septentrionale de la Côte d’Ivoire, et au-delà dans la colonie de la Haute Volta. Une convention est même signée avec le Moro Naba de Ouagadougou à qui est versée une partie de la rémunération de ses sujets convoyés en Basse Côte pour servir de main d’œuvre agricole. Cette main d’œuvre, logée à proximité des plantations, va donner naissance à la bourgade cosmopolite de SAMO qui est une déformation de SIAMO. Quand Houphouët créé ses vastes plantations de café et de cacao entre Yamoussoukro et Bouaflé, il s’inspire de l’exemple de ses collègues planteurs du Sud-Comoé. Une forte population de la Haute Volta descend pour servir de main d’œuvre. C’est cette forte communauté qui se regroupe dans des bourgades à qui elle donne des noms qui se réfèrent à leur sphère d’origine en Haute-Volta. Ces villages serviront de point de départ de ladite communauté à la conquête des terres du grand Ouest ivoirien. La pression qui s’exerce sur la terre, qui se rétrécie comme peau de chagrin, nourrit de graves antagonismes qui débouchent sur des conflits qui deviennent au fil du temps très violents. Ces conflits sont favorisés par la faiblesse de la législation foncière qui a gardé tous ses habits de l’époque coloniale et la grande corruption de l’administration. Le peu d’intérêt accordé à l’état civil complète le cocktail explosif. A partir des années 90, cette forte communauté devient un enjeu important pour Ouattara et le RDR dans leur conquête du pouvoir d’Etat. S’autoproclamant son protecteur, Ouattara en a fait une communauté de soutiens captifs. Ce n’est donc pas étonnant qu’elle ait été l’une des pourvoyeuses de la main d’œuvre de la rébellion de 2002. C’est également la raison pour laquelle Ouattara entend lancer sa campagne à Bouaké qui abrite une très forte communauté de la CEDEAO, de loin plus nombreuse que les autochtones. La foule des non électeurs justifiera a posteriori sa victoire et sa supposée popularité. Mais la conservation du pouvoir par OUATTARA ne résoudra pas, pour autant, cet épineux problème. Il faut un consensus national sur cette question de sorte à faire sortir cette communauté du jeu des intérêts politiques. Autrement, elle sera toujours la proie de tous les aventuriers politiques et la cohésion sociale restera une faiblesse permanente dans le pays.
Le consensus national est nécessaire pour régler définitivement la question de la communauté étrangère en vue de son intégration suivant des modalités précises. La solution passe absolument par une consultation du peuple par référendum. La solution par la petite porte, comme celle que l’on propose actuellement à Bouaflé et qui consiste à donner automatiquement des pièces d’identité à la forte communauté d’origine burkinabé, va aggraver la méfiance entre les populations. La communauté étrangère sera toujours perçue comme usurpatrice de la nationalité. Le problème est plus que l’établissement d’une pièce d’identité. Il s’agit d’un problème de conscience sociale qui doit être résolu avec l’implication des populations ivoiriennes elles-mêmes. Si les grands partis politiques appellent à voter oui à ce référendum, nous aurons débarrassé le pays d’une tumeur qui est devenue menaçante pour l’équilibre de la nation et l’arme de prédilection de Ouattara. L’exploitation malhonnête de ce problème a fragilisé la cohésion sociale. Ouattara y a assis toute sa stratégie de conquête et de conservation du pouvoir. Pourtant il ne l’a pas résolu ou, du moins, ses tentatives de résolution sont mal perçues par les populations nationales autochtones. C’est pourquoi, celles-ci doivent être associées à tout mécanisme d’intégrations des communautés étrangères qui vivent dans le pays depuis plusieurs décennies et dont la présence est une réalité sociologique qu’on ne peut ignorer. C’est une erreur pour les membres de cette communauté de penser que leur salut se trouve dans la pérennisation du pouvoir de Ouattara. C’est plutôt un statut juridique solide, construit à partir de la volonté populaire des autochtones, qui va assurer leur intégration parfaite à la communauté nationale. C’est pourquoi, cette communauté a tout intérêt à soutenir l’appel à la désobéissance civile qui devra déboucher sur un nouveau contrat social qui tiendra forcément compte, pour l’intérêt de la nation, de l’intégration de ses membres.
Prenons une fois courage et dans un élan de solidarité nationale, posons les fondements d’un nouveau contrat social. Le problème de la Côte d’Ivoire n’est pas d’avoir son parent ou son coreligionnaire à sa tête. Il n’est même pas d’ordre électoral. Le pays a besoin d’un nouveau départ. 30 années de manipulation ethnico- religieux ou de repli identitaire clanique, ça suffit.
Le ministre Justin Katinan KONE