Lectures, analyses et réflexions de Raphaël

Vous trouverez ici des comptes rendus de lectures livresques concernant essentiellement l'histoire des Noirs d'Afrique et celle des Afrodescendants des Amériques et d'Europe. Les actualités de la diaspora africaine ne sont pas oubliées.

26 mai 2011

Mots d'excuse (Les parents écrivent aux enseignants)

                         Mots d'excuse

          Les parents écrivent aux enseignants

 

Mots_d_excuse_0001            Voici le livre que tous les enseignants ont rêvé de publier. A un moment ou à un autre de sa carrière, l'enseignant  a pensé ou pense qu'il serait intéressant de publier un livre fait de la somme des mots qu'il reçoit des parents. Patrice Romain l'a fait. Quel est donc cet intérêt ? Avant tout, montrer les rapports houleux entre cette profession et les familles. Permettre ensuite de voir, hors du cercle familial, la relation que les humains ont les uns aux autres avec l'enfant placé au centre des débats.

 

            Il est certain qu'une telle compilation révèle plus que l'humeur des hommes et des femmes. Elle est l'image d'une société à un moment donné. Et l'image de la société française en ce début du XXIè siècle est celle de l'amour de soi, des certitudes vite affichées et de la défense de l'enfant roi. Dans une cinquantaine d'années, d'autres  "mots" révéleront sûrement un autre état d'esprit de notre société.

 

            Mots d'excuse est un recueil plaisant dont la lecture ne peut se faire que ponctuée de rires qui arrachent des larmes. Bien sûr, quand rien ne va, c'est vers l'enseignant, Dieu le Père, qu'il faut se tourner à défaut de l'accuser de tous les maux.

 

            Monsieur,

                        Vous me dites que Christophe était encore en retard ce matin. Je vous promets pourtant que je le lève avant de partir travailler. Pouvez-vous lui expliquer que le plus court chemin pour aller d'un point à un autre c'est la ligne droite et non pas le tour du quartier parce que à mon avis il doit prendre le chemin des écoliers.

            Salutations.

 

            Certains mots sont d'une logique imparable !

 

            Monsieur,

                        Mon fils était en retard hier, mais il navait pas de mot parsse que si je fesais un mot il serait encore plus en retard et vous aurez été encore plus en colère.

 

            Madame,

                        Vous me demandez un mot d'excuse pour le retard exceptionnel de Charlotte. Soit. Ne pensez-vous pas cependant qu'à l'heure où se prépare peut-être la 3ème guerre mondiale il y a des choses plus importantes dans la vie ?

            Salutations distinguées.

 

            Et sur les retards, il ne faut pas être trop pointilleux ; sinon....

 

            Monsieur,

            Oui Thomas arrive souvent en retar et non je ne fait pas de mot. Mais si vous voulez maidé le matin avec les quatres a habiyé, ya aucun problème je vous ouvre la porte quand vous voulez.         

 

            Il arrive que ces mots nous introduisent directement au coeur des foyers et parfois même des conflits conjugaux.

 

            Monsieur,

                        Veuillez excusé l'absence de Cédric hier mais ses mon ex mari qui l'avez ce week end et il est parti chez les parents à son espesse de copine en Bretagne et ce faignant il a pas eu le courage de me le rendre dimanche soir il la gardé à dormir chez lui mais ne vous en faite pas j'ai téphoné à mon avocat et ça va chaufé pour son matricule car lécole ses important.

 

            Et c'est justement sur ce dernier chapitre que les avis divergent sur l'intérêt de Mots d'excuse. Dans le Cahier du "Monde" N° 20413 du vendredi 10 septembre 2010, Jean Birnbaum semble nous dire qu'il n'est pas sain d'étaler ainsi la photographie de la misère : « ... tout le malaise vient justement du fait qu'aucune photographie n'est neutre, et que celle-ci est livrée sans légende. Or, par de-là leur désordre apparent, les "mots d'excuse" laissent entrevoir une société d'ordre, un univers où tout accroc aux règles se trouve sanctionné par l'exclusion des plus faibles, à jamais "inexcusables". Pour en prendre la mesure, il aurait fallu inscrire ces écritures précaires dans leur contexte culturel et social. »

 

            Il apparaît évident que l'auteur de l'article a fait une lecture misérabiliste et catégorielle du livre. Nulle part dans ce recueil n'apparaît la volonté de montrer du doigt les plus pauvres même si dans l'esprit du commun l'orthographe approximative de certains "mots" nous y renvoie.

 

            Il convient ici de rappeler à Jean Birnbaum deux choses : La première, c'est que l'école de la République accueille indistinctement les enfants de tous les milieux sociaux et culturels. Il est même sûr que certains "mots" émanent de la plume de ceux que l'on nomme communément les notables des cités de France. La misère de l'esprit de notre époque y apparaît autant que dans les écrits à orthographe approximative. En d'autres termes, la misère de l'esprit n'est pas le monopole des pauvres. La deuxième chose, c'est que l'orgueil n'est pas non plus le monopole des riches. Et bien souvent les pauvres le clament beaucoup plus fort parce qu'ils pensent que les riches les croient indignes de ce sentiment.

 

            Aussi, on ne peut nullement considérer la publication de ces « Mots d’excuse » comme une façon de sanctionner les plus faibles ou de les montrer du doigt afin de les frapper d’une quelconque exclusion. Tous les parents qui s’expriment par ces mots n’ont absolument pas le sentiment d’être des faibles, des parias qu’il faut cacher, qui n’ont pas le droit de faire valoir leur sentiment parce qu’ils ont une orthographe boiteuse. Non ! Tous témoignent d’une volonté de se faire entendre, de dire qu’ils existent ! C’est justement pour cela qu’ils écrivent. A force de ne les considérer que comme des faibles, les médias et les hommes politiques ne les écoutent jamais. Bien sûr, on sourit et on rit en lisant ces « mots ». Mais chacun d’eux porte en lui la fierté des êtres, parfois fragiles certes, mais des êtres qui n’attendent qu’une chose : être entendus !  Et l’enseignant auquel ils s’adressent est pour eux un agent de l’Etat, une oreille de l’Etat. Pourquoi donc se gêner pour une fois qu’on a cette occasion ? Leurs propos devraient-ils être cachés parce que remplis de maladresses, de fautes lexicales et grammaticales ou parce qu'ils révèlent leur univers ? Quelle injustice ! 

 

Raphaël ADJOBI

 

Auteur : Patrice Romain

Titre : Mots d'excuse (125 pages)

Editeur : François Bourin Editeur, août 2010

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23 mai 2011

Les pages politiques de Raphaël

         La mort en face à Douéké avec les Dozos

              les rebelles paysans venus du nord

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28 avril 2011

Noires blessures (un roman de Louis-Philippe Dalembert)

  Noires blessures

                   (un roman de Louis-Philippe Dalembert)

 

Noires_blessures_0004            Dès le départ, c’est un châtiment physique artistique qui nous est donné. On devine aisément que le Noir - la victime - est l’employé ou le subordonné du Blanc, son bourreau. Mais on ne comprend pas pourquoi le châtiment lui est infligé au son de la musique et en exécutant des jeux de jambes à la Mohamed Ali alias Cassius Clay.

 

            Pour comprendre ce sadisme apparent, l’auteur nous fait remonter dans le passé des deux personnages comme on remonte par un long tunnel dans la conscience pour expliquer le présent. Et que découvre-t-on ? Je me contenterai de vous donner la couleur de la substance qui a conduit ces deux êtres nés sur des continents différents à se rejoindre et à sombrer dans ce que tout lecteur qualifiera de traquenard de la vie pour ne pas dire du destin.

 

            C’est Mamad, le Noir, qui le premier raconte sa vie faite de l’absence du père mort alors qu’il n’avait que sept mois ; une vie marquée par la faim qu’il s’évertuait à cacher pour ne point ternir l’image d’une mère courageuse mais dont la ténacité ne pouvait venir à bout de la pauvreté omniprésente. Benjamin d’une famille de sept enfants, dès la classe de sixième, il troque son rang de petit dernier jouissant de la protection de tous pour devenir « celui dont la mission consiste à sauver le reste de la famille, à la sortir de la gêne ». S'appuyant sur son extraordinaire mémoire qui laisse présager un avenir certain, il use de stratagèmes auprès de ses camarades pour s’offrir de maigres repas afin de ne pas abandonner ses études. Mais c'est en définitive l'image d'un enfant au cœur flétri par les humiliations auxquelles l’expose la pauvreté de sa mère qui ne peut s’acquitter de manière régulière du coût de sa scolarité qui s'impose à l'esprit du lecteur.

 

            Rarement la peinture de la pauvreté a été aussi poignante dans un roman ; rarement celle de la faim a montré un visage aussi douloureux. Et quand l’espoir se brise et que la faim aiguillonne l’imagination, l’appel de l’exil, même chargé d’images tristes, apparaît comme une solution. A ce moment du livre, l’auteur produit quelques belles pages d’analyse sur la tentation de l’exil. Mais comme dit Mamad, « on accroche souvent ses rêves plus haut que la réalité ». Il finira donc domestique chez un Blanc de son pays.

 

            Laurent, le Blanc, le parisien, n’a pas la stature élancée d’un athlète. Mais son père, un soixante-huitard passionné de jazz et grand admirateur des sportifs noirs - en particulier de Mohamed Ali  -  lui fait quotidiennement partager les passions que sa femme ne peut supporter. Assurément, Jean-Philippe Dalembert signe dans ce roman de très belles pages sur les conflits conjugaux vus sous l’angle de l’enfant. L’une des particularités de ce roman est d’ailleurs de traiter de manière très complète et convaincante certains sujets comme la place des Noirs dans le sport, la ségrégation raciale au sein de l’armée américaine lors de la dernière grande guerre, la multiplication très contestable des ONG que l’Europe destine aux pays pauvres sous le couvert d’action humanitaire. C’est d’ailleurs ainsi que Laurent va partir en Afrique et s’occuper de protéger des singes. Mais si comme Mamad, Laurent traîne dans son esprit la présence constante du père absent, lui a connu son père et n’a jamais pardonné à ceux par qui sa mort est arrivée. Et il porte plus douloureusement cette absence d’autant qu’elle lui semble exiger vengeance.

 

            En présentant ce roman comme un retour au passé pour expliquer le présent, on croit, dès les premières pages, se lancer dans la lecture d’une histoire aux contours lisses et donc sans grand intérêt. Erreur ! Ce roman est une œuvre très riche en réflexions sur le fonctionnement de notre société et son impact sur l’esprit des hommes. D’ailleurs, la profusion des thèmes qu’il contient et qui sont traités avec une extraordinaire justesse en fait plus qu’un roman ; c’est une sorte d’œuvre psychanalytique de certains maux comme la faim, la pauvreté, l’absence de la figure du mâle dans la construction de l’individu. Ce roman nous rappelle la fragilité des êtres qui nous entourent ; des êtres souvent brisés, porteurs de blessures de toutes sortes que nous ignorons et qui conditionnent les comportements que nous ne comprenons pas.

 

Raphaël ADJOBI

 

Titre : Noires blessures, 222 pages

Auteur : Louis-Philippe Dalembert

Editeur : Mercure de France

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23 avril 2011

Mes pages politiques

  Notes à mes amis bloggeurs et aux visiteurs inconnus     

 

                              Mes pages politiques

                        sont désormais sur Ivoire blog :

       http://leblogpolitiquederaphael.ivoire-blog.com

             

                   Ce blog-ci garde sa vocation première

 

                                     Nouvel article !

Les Africains de la diaspora solidaires de Laurent Gbagbo

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NB : Lien permanent en haut à droite de ce blog ! 

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17 avril 2011

Moreau de Saint Méry, métis créole ennemi des Noirs au XVIII è siècle

                Moreau de Saint Mery, métis créole,*

               historien érudit et homme politique français,

                         Ennemi des Noirs au XVIII è siècle 

 

* Selon certains, Moreau de Saint Méry serait créole (originaire des colonies antillaises) et nom point métis et créole. Il faut espérer que ceux qui disent cela ne fondent pas leur opinion sur la seule blancheur de sa peau. Quant à mon article, il est basé sur ce qu'en dit Marylène Patou-Mathis.  

 

Moreau_de_StM__0002            C’est en lisant Le sauvage et le préhistorique, miroir de l’homme occidental de Marylène Patou-Mathis (éd. Odile Jacob) que j’ai découvert l’extraordinaire portrait de Moreau de Saint Méry, métis créole, historien érudit et homme politique conservateur.  Si son histoire que je livre ici choque tous les lecteurs noirs, je m’en réjouirai. Car alors ils sont capables de bon sens pour se laisser aller au même sentiment à l’égard de certains acteurs de l’histoire récente des pays d’Afrique. S’allier avec les Blancs pour combattre les Noirs au nom de ses intérêts et ambitions personnels, c’est ce que fit Moreau de Saint Méry au 18 è siècle ; et avec l'excès qui caractérise tous les Noirs et tous ceux qui ont un soupçon de sang noir qui se disent amis des Blancs.

 

            Il est connu que c’est avec la traite négrière atlantique que la catégorisation des humains en « civilisés » (Blancs et chrétiens) et « sauvages » (naturels) a pris son essor en Europe. Afin de justifier l’esclavage, on cherche alors par tous les moyens à déterminer la place du Noir dans l’échelle des Êtres. La science et le discours philosophique émettent les hypothèses les plus folles. C’est à cette époque que l’on tient la parenté entre l’homme et le primate comme une considération digne de foi. Mais la reconnaissance de l’unité de l’espèce par les naturalistes et les philosophes n’empêche pas la croyance ferme en l’idée de la dégénération de la couleur blanche – considérée comme originelle – pour expliquer la diversité de l’espèce humaine et par la même occasion l’infériorité des Noirs. Si à l’origine l’homme est blanc, le Noir n’est donc rien d’autre qu’une chute ou un retour vers l’animalité.

 

            Dans toute l’Europe, on se perd dans des hypothèses et des analyses fantaisistes pour asseoir la place du Noir parmi les hommes. La catégorisation aboutit forcément à la « racialisation ». On peut classer les hommes en quatre races, disent les uns. On peut les classer en cinq ou six, disent les autres. C’est alors qu’entre en scène Moreau de Saint Méry, métis mais colon, soucieux du maintien de l’ordre colonial naissant et qui avait, en 1771, crée un « Comité colonial » au sein du parlement de Paris. Issu d’une famille de notables de la Martinique, c’est un grand partisan d’une différenciation raciale fondée sur la couleur de la peau. Auteur d’une Histoire de Haïti et propriétaire d’esclaves, il va violemment s’opposer à Diderot qui au nom du « droit naturel » critique les conquêtes des terres étrangères et dénie aux Européens le droit de ces actes. Lui, Moreau de Saint Méry, « il revendique le despotisme légal du régime esclavagiste et la ségrégation contre les hommes libres de couleur[…] Opposé au droit des autres métis à Saint-Domingue, son île d’adoption, il propose une échelle des Êtres comprenant cent vingt-huit variantes qui va de "Blanc pur" (au sommet) au "Noir pur" (à la base)». Dans l'entreprise de « racialisation », il fait donc mieux que les scientifiques blancs exempts de sang noir! Une goutte de ce sang rendrait-il plus amer ?

 

            A ce stade du livre, je reste sans voix, ahuri. Une seule réflexion me vient à l’esprit : il n’y a pas mieux que le Noir ou celui qui a quelque ascendance avec cette couleur de peau pour servir de fer de lance aux combats des Blancs contre les Noirs. A toutes les époques, les meilleurs ennemis des Noirs, ceux qui proposeront les méthodes les plus violentes et les plus expéditives contre les leurs seront les Noirs eux-mêmes. Fier de porter le masque blanc qui le fait ami des Blancs, le Noir devient un preux chevalier qui choisit toujours sa victime parmi les siens.

 

            Pour achever son œuvre, Moreau de Saint Méry votera en 1791 l’inscription de l’esclavage dans la Constitution française. Inquiété par ses adversaires, il se réfugie aux Etats-Unis d’où il reviendra en 1798 pour occuper, grâce à Napoléon 1er, un poste au Ministère de la Marine et une affectation en Italie, à Parme.

 

            Mais, me direz-vous, ceux qui aujourd’hui, çà et là, appellent sans vergogne la guerre contre leur pays pour sauvegarder leurs intérêts, ceux qui confisquent l’argent des pauvres en demandant aux Blancs de fermer leurs banques, ceux qui affament les leurs en demandant aux Blancs de ne pas acheter leurs produits, ceux-là sont-ils meilleurs que Moreau de Saint Méry ? Quiconque est incapable de s’indigner des maux d’aujourd’hui et de les combattre doit se garder de juger sévèrement ceux que l’histoire nous remet en mémoire.      

 

Raphaël ADJOBI

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06 avril 2011

Laurent Gbagbo entre dans l'histoire avant l'heure

           Laurent Gbagbo entre dans l’histoire

      avant l’heure

 

Laurent_Gbagbo_ds_l_Hist_0001_crop            Je suis de ceux qui n’avaient absolument pas compris le repli du président Laurent Gbagbo sur les seuls symboles institutionnels après avoir abandonné le reste du pays aux mains des rebelles. J’ignorais que, dès le départ, la partie était inégale suite à la décision de l’armée française en Côte d’Ivoire ainsi que celle de l’Onuci de participer activement aux côtés des rebelles à sa chute en les transportant et en les renseignant sur les positions ennemies.

 

            C’est le moment de me rattraper en participant à l’hommage que le monde entier semble lui rendre en mettant en évidence la ligne du combat qu’il mène depuis son élection en 2000. Dans aucun des films documentaires que je rassemble ici comme pour constituer un cabinet d'archives, jamais sa légitimité n’est contestée et jamais sa réélection n’est mise en doute. Les investigateurs attentifs (majoritairement européens) qui scrutent les événements afin de nous donner une lecture claire de l’histoire récente de l’Afrique et de ses relations avec les grandes puissances sont tous unanimes : Laurent Gbagbo est pour l’occident l’homme à abattre parce que tout en octroyant des contrats aux hommes d’affaires français, il a entrepris de diversifier ses contrats en introduisant la Chine dans l’Ouest africain. Au Congo, le fils Kabila semble suivre son chemin et est également mal vu.

 

            Avant sa mort, Laurent Gbagbo est entré dans l’histoire, abandonné par ses pairs. Rare sont les hommes politiques sur cette terre qui ont connu une gloire semblable. Aujourd’hui, aucun film sur la géopolitique africaine ne peut se permettre de ne pas mentionner son nom. Chaque jour ajouté à sa résistance au néo-colonialisme franco-américain est une étoile supplémentaire à sa couronne de combattant pour l'indépendance de l'Afrique. Il est temps que sur ce continent et en Europe des manifestations s’organisent pour dénoncer non seulement le lynchage médiatique dont il est l’objet mais surtout cette guerre inique menée contre sa personne par la France et les Etats-Unis. Car c’est au nom des peuples français et américains que la chasse à l’homme est engagée par ces deux pays occidentaux qui lui refusent - de manière officielle depuis ce 4 avril 2011 - le droit de se défendre contre ses ennemis locaux.

 

            Voici donc la série de documents que vous pourrez venir consulter autant de fois que vous voudrez. Je voudrais saisir l’occasion pour remercier le blogueur Delugio pour le suivi régulier qu’il fait des événements en Côte d’ivoire. De nombreux liens que je donne ici mènent d’ailleurs à son blog que vous gagnerez à visiter quotidiennement.

 

Témoignage de Dominique-François UGEUX, ancien député

belge, président de l’association royale de la presse Nord-Sud

 

QUESTION : Qu’est-ce qui n’a pas marché pour qu’on en arrive à une telle crise après l’élection présidentielle ?

DOMINIQUE-FRANÇOIS UGEUX : En tant que président de l’Association royale de la presse Nord-Sud, j’étais ici sur la terrasse de l’hôtel Pullman pendant la proclamation des résultats. Vous devez savoir qu’ici, il y avait des journalistes correspondants de chaines que je ne vais pas citer. Ils venaient s’asseoir sur la terrasse pour discuter et surtout pour capter leur satellite pour le journal en duplex. A cet endroit, j’ai assisté à une scène des plus révoltantes au monde. Ce que je vais vous dire, résume beaucoup de choses sur la crise en Côte d’Ivoire, et n’appellera pas d’autres commentaires. Il était 17 heures 15 mn, le lundi 6 décembre 2010, ici à la terrasse de l’« hôtel Pullman ». J’échangeais avec un journaliste avec lequel j’avais lié connaissance au premier tour et qui était là pour le second tour de l’élection présidentielle. On discutait de la déontologie et de la liberté de la presse. A 18 heures, 19 heures pour Paris, avec son portable et l’amplificateur, il appelle Paris à un mètre de moi. Il a dit « allo ! Paris, je fais la manchette sur Abidjan ». « Il y a des embouteillages, tout est normal, il fait calme, Abidjan bouge, le peuple est heureux, Laurent Gbagbo est élu ». Alors on entend Paris dire: « tu ne peux pas dire ça. Tu dois dire qu’il y a une tension vive à Abidjan que les Ivoiriens ont peur, les rues sont désertes, les Ivoiriens contestent la victoire de Gbagbo ». Voilà ce dont j’ai été témoin. En temps que président de l’Association royale de la presse Nord-Sud, je dis que c’est indigne d’un pays comme la France. L’objectivité n’existe pas mais l’honnêteté intellectuelle existe.

 

Le film sur la vie et le combat politique de Laurent Gbagbo :

http://unevingtaine.blogspot.com/2011/04/un-homme-dont-le-nom-brillera.html

 

Le film « Laurent Gbagbo dans le tourbillon du Golfe de Guinée »

http://unevingtaine.blogspot.com/2011/03/laurent-gbagbo-dans-le-tourbillon-du.html

 

Un article du journal burkinabé qui est un véritable hommage à la résistance de Laurent Gbagbo à l’attaque concertée entre rebelles ouattaristes, forces françaises Licorne et forces onusiennes Onuci.

http://www.sanfinna.com/avuedemonde1.htm

 

Une vidéo réalisée à Yopougon, banlieue d’Abidjan, le 1er avril à 15 h par un résident étranger qui prend en flagrant délit la force française Licorne déversant sur le toit d’un immeuble des tireurs d’élite lors d’une manifestation des partisans du président Laurent Gbagbo. 

http://unevingtaine.blogspot.com/2011/04/la-licorne-depose-ses-snipers-francais.html

 

Les Camerounais se prononcent sur la crise ivoirienne (1ere partie)

http://www.rti.ci/cgi-bin/page.cgi?g=Detailed%2F3245.html;d=1

 

Les Camerounais soutiennent la C. Ivoire (2e partie)

http://www.rti.ci/cgi-bin/page.cgi?g=Detailed%2F3347.html;d=1

 

 

Raphaël ADJOBI

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31 mars 2011

Laurent Gbagbo perd la Côte d'Ivoire

  Laurent Gbagbo perd la Côte d'Ivoire

 

J’ai rédigé l’article ci-dessous hier soir après vingt heures. J’étais alors loin de croire que ce que j’écrivais à propos de la conquête de l’ouest et la prise de San Pedro allait être le sujet d’actualité de ce jeudi 31 mars. France Inter a, en effet, annoncé ce matin la prise de San Pedro par les Rebelles. Je vous livre mon texte sans aucune modification.  

 

Election_en_C            Il était difficile de penser qu'en si peu de temps Laurent Gbagbo braderait le capital confiance que des millions d'Ivoiriens ont placé en lui en soutenant les institutions du pays contre les forces étrangères et leur missionnaire Alassane Ouattara. Fin politique, il s'est en quelques jours révélé un piètre combattant attendant l'ennemi terré dans son palais d'Abidjan.

 

            « Ils ont la montre, nous avons le temps », scandait Blé Goudé lors du dernier rassemblement des patriotes sur les bords de la lagune Ebrié à Abidjan les 27et 28 mars. En peu de temps, ce sont les partisans de Laurent Gbagbo qui ont commencé à regarder leur montre. Mais est-ce que cela vaut encore la peine ? N'est-ce pas du temps perdu ? Pire, n’est-il pas déjà trop tard ? Ce sont désormais les rebelles qui prennent bien leur temps. Tout est devenu si facile pour eux qu'ils n'y croient pas eux-mêmes. Alors ils se méfient.

 

            Laurent Gbagbo est en train de perdre le pouvoir et la confiance des Ivoiriens - une double perte donc - pour ne pas avoir eu l'intelligence militaire d'endiguer immédiatement les premières attaques des rebelles dans l'ouest du pays. C'est à croire qu'il n'y a toujours pas d'armée en Côte d'ivoire pour veiller au moins sur les limites de la zone loyaliste. Occupés à contrôler les combats de rue d'Abidjan, Laurent Gbagbo et ses soldats ont complètement oublié le reste de la Côte d'Ivoire libre.

 

            La stratégie des soldats d'Alassane Ouattara est simple : se faire convoyer par l'ONUCI vers les différentes villes de l'intérieur afin d'en prendre possession en surgissant comme par enchantement. Au milieu du mois de mars, c'est un convoi de l'ONUCI que les jeunes de Bonoua (à 60 km à l'Est d'Abidjan) ont empêché de pénétrer dans leur ville en se couchant sur la route nationale qui la traverse. Sans cette vigilance, l'ONUCI aurait laissé armes et rebelles dans un coin de la ville. Et un beau matin, ces derniers auraient surgi et déclaré la ville entre leurs mains.

 

            Si cette stratégie se poursuit, c'est parce que le pouvoir militaire a fait preuve de faiblesse en se montrant attentiste. Car au départ, les rebelles semblaient plutôt privilégier le combat à long terme. Aussi visaient-ils la prise de tout l'ouest du pays jusqu'au port de San Pedro afin d'avoir accès au deuxième port du pays dans le cas où les forces s'équilibreraient et où un nouveau cessez-le-feu mettrait fin aux combats. Imaginez donc les rebelles tenant le nord et l'ouest du pays. La portion restant à Laurent Gbagbo serait réduite à si peu de chose qu'il serait ridicule qu'il persistât à se maintenir au pouvoir au nom de la légitimité constitutionnelle. D'autre part, le vieux projet burkinabé d'avoir un accès à la mer serait accompli. Chasser Laurent Gbagbo du pouvoir serait même devenu chose inutile. A défaut d'avoir toute la Côte d'Ivoire, les Burkinabé et leur émissaire Alassane Dramane Ouattara auraient un port et plus de la moitié des ressources agricoles et minières du pays.

 

            Mais voilà que devant leur percée, seul le silence leur répond. Apparemment, aux armes des rebelles Laurent Gbagbo ne compte n'opposer que les prières et le patriotisme des sudistes qui l'ont sauvé du coup d'état français de 2004. Devant donc le silence, les rebelles semblent désormais avoir chosi la guérilla urbaine plutôt que la conquête de l'ouest ou peut-être les deux à la fois. En s'installant dans les villes, ils n'offrent plus un front unique aux armes des loyalistes. Cette technique rendra à ceux-ci la tâche difficile quand il faudra reprendre les villes occupées. Ou ils hésiteront à tuer les leurs pour déloger quelques rebelles ou ils attaqueront et le carnage sera si grand que prétextant l’aide humanitaire, les forces de l’ONU (ONUCI), celles de la France (Licorne) et celles de la CEDEAO interviendront pour remettre par la force le pouvoir à Alassane Ouattara.

 

Raphaël ADJOBI 

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30 mars 2011

Mon premier Salon du livre

                           Mon premier Salon du livre

 

Salon_du_livre_            Ce sont des obligations professionnelles qui m'ont contraint à choisir le lundi 21 mars, dernier jour de l'exposition, pour me rendre au Salon du livre. C'était aussi le jour des professionnels. Malheureusement, j'ai très vite appris à mes dépens qu'un professeur de français n'est pas considéré comme un professionnel du livre. A vrai dire, ce n'était point là le sens de la formule. Il fallait comprendre  « journée des professionnels de l'édition ». Ouf ! Je n'étais pas loin d'être très vexé. J'ai donc attendu 13 heures pour accéder au salon comme tous les « non professionnels ».

 

            Le côté déplaisant de ce salon c'est qu'il avait quelque chose d'une foire aux puces avec les multiples cortèges des établissements primaires et collèges de Paris et de ses environs. Pendant que les plus petits avaient le nez dans les piles de livres à la recherche de je ne sais quel objet rare, - ce qu'on apprécie - les adolescents se pavanaient nonchalamment dans les allées ou s'installaient dans un coin pour déguster le sandwich qu'ils avaient pris soin d'emporter pour ne pas mourir de faim. On le sait bien, la lecture n'a jamais rempli le ventre. Que chaque adulte tire ses conclusions quant au profit qu'un tel public peut faire de cette visite. Il me semble que les bibliothèques suffisent aux besoins de la jeunesse d'un certain âge.

 

            Il y a cependant une chose qui retient agréablement l'attention dès que l'on pénètre dans l'enceinte du salon : c'est la magnificence des lieux, disons la beauté du décor. Tout invite à un moment de plaisir des yeux et fait naître en vous l'espoir d'une belle rencontre. Mais les stands des grands éditeurs tenus par de jeunes étudiantes ne sont guère engageants. En pareille occasion, le visiteur rêve d'approcher des spécialistes et non des intérimaires retenus pour se faire un peu d'argent de poche ou pour arrondir leur fin de mois.

Salon_du_livre_2_ 

            La belle découverte que je fis ce jour-là fut le stand du bassin du Congo. Un grand et beau stand agréablement décoré. Henri Lopes, qui fait aujourd'hui figure d'ancien, y tenait une conférence avec quelques éditeurs africains. Arrivé aux dernières minutes du débat avec le public, je me suis contenté de quelques images à défaut d'informations sur les éditions africaines et les jeunes écrivains. Une chose est sûre : les écrivains congolais ont honorablement gagné leurs galons de groupe littéraire dans le monde de la littérature. En d'autres termes, on peut aujourd'hui parler de littérature congolaise comme l'on parle de littérature française ou anglaise. C'est véritablement un univers géographique suffisamment riche en production littéraire pour qu'on la singularise dans ce que l'on nomme communément la littérature africaine. Ceux qui pensent à la nécessité d'un salon du livre sur les terres congolaises ont raison de souhaiter cette expérience qui serait un moyen d'ancrer les écrivains dans le milieu social qui est la source première de leur inspiration. Il faut éviter de faire de la littérature congolaise une littérature étrangère écrite et éditée à l'étranger pour le public européen et la diaspora africaine.Serge_diantantu_

 

            Après quelques photos donc, je quitte le stand du bassin du Congo. Et c'est à quelques pas de là que je vais trouver mon bonheur de lecteur de l'histoire des Noirs. Zut ! je n'ai pas retenu le nom du stand. Qu'importe ! Mon bonheur est total. Je fais là la connaissance de deux auteurs de bandes dessinées historiques : Serge Diantantu qui publie Mémoire de L'esclavage et Roland Monpierre qui consacre son dernier album à La légion Saint-Georges. Deux ouvrages édités par Caraïbéditions. J'échange longuement avec eux et obtiens deux dédicaces illustrées.

 

            La bande dessinée au service de l'histoire des Noirs ! Une belle idée qu'il faudra creuser davantage. Ce peut être une façon moins austère de mettre l'histoire des Noirs à la portée des adolescents et même des moins jeunes.Roland_Monpierre_

 

            Mon premier Salon du livre fut donc un moment bien agréable. L'après-midi que j'y ai passé m'a vite fait oublier ma longue et inutile attente du matin. Mon seul regret : avoir manqué le rendez-vous du samedi avec mes amis blogueurs. Si le Salon du livre est un moment de rencontre entre auteurs et lecteurs, c'est assurément un grand plaisir d'y rencontrer également ceux qui ont la même passion que nous : la lecture.

 

Raphaël ADJOBI

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20 mars 2011

Côte d'Ivoire postélectorale : l'U.A. n'est pas garçon !

                     Côte d'Ivoire postélectorale :

                          l'U.A n'est pas garçon !*

 

Union_Afric            En proposant comme solution à la crise postélectorale en Côte d'Ivoire le retour à la case "départ" avec un gouvernement d'union présidé par Alassane Dramane Ouattara, l'U.A vient non seulement de démontrer son manque de courage à prendre ses responsabilités vis à vis de l'Union Européenne mais aussi qu'elle persiste à contribuer à la déstabilisation de ce pays. Un acte à double conséquence que l'histoire ne manquera pas de rappeler à la conscience des Africains comme la preuve qu'ils sont leurs propres bourreaux.

 

            Certes, le rôle du panel des chefs d'Etats africains chargés de proposer une solution définitive à la crise était délicat à plus d'un titre. D'abord, à la suite de Sarkozy et d'Obama, ils ont plongé comme des moutons dans le précipice ouvert par les deux hommes. Ensuite, ils sont allés jusqu'à sonner la charge guerrière contre la Côte d'Ivoire avant que Sarkozy ne leur dise de recourir finalement au dialogue vainement proposé au départ par Laurent Gbagbo. Comment pouvaient-ils après cela se renier ? Enfin, dans la constitution du panel chargé de trouver le remède salvateur, il a manqué à l'U.A la sagesse de ne pas y inclure des hommes impliqués de près ou de loin dans la crise. Oui, il a manqué aux chefs d'Etats Africains cette intelligence qui leur aurait permis de prendre le risque de ne considérer que l'analyse des résultats des élections pour se prononcer comme des juges impartiaux. Au regard de tous ces manquements, comment ce panel pouvait-il avoir l'apparence d'un groupe de sages volant au secours d'un pays en grande difficulté, d'un pays frère ? Non, le panel n'avait pas la carrure du sage et était donc condamné à se fourvoyer.

 

            Malgré tous ces manquements, les cinq chefs d'Etat Africain chargés de proposer une solution définitive auraient pu réussir s'ils s'étaient fixé un objectif clair comme la recherche de la vérité sur les résultats du deuxième tour des élections. Oui, ils seraient sortis de l'impasse dans laquelle les a engagés leurs prises de position hasardeuses s'ils s'étaient limités uniquement à la consultation des documents pour dire qui des deux candidats a gagné, et si le Conseil Constitutionnel a favorisé ou non Laurent Gbagbo au détriment d'Alassane Ouattara. Au lieu de cela, ils ont cherché des remèdes sans avoir pris le temps de savoir où se situe le mal ou encore si le malade souffre d'une maladie imaginaire. S'ils s'étaient fixé pour objectif de juger le vrai du faux, ils auraient agi en sages et auraient reconnu avoir été trompés ou auraient confondu Laurent Gbagbo et le Conseil Constitutionnel. La terre entière aurait alors salué leur probité et leur impartialité et ils auraient par leur acte permis à l'Afrique de faire un grand pas vers l'indépendance morale et politique.

 

            Comme diraient les Ivoiriens, l'U.A n'est pas garçon ! Incapable de prendre ses responsabilités, elle a préféré renvoyer les Ivoiriens à la case "départ" avec un gouvernement d'union et un pays coupé en deux. Incapable de dire qui a gagné les élections avec les preuves à l'appui, elle remet la Côte d'Ivoire dans l'exacte situation dans laquelle elle se trouve depuis 2002. L’absence d’éléments électoraux clairs justifiant sa décision fait apparaître celle-ci comme la simple confirmation de sa position initiale. Rien de plus ! Adieu espoir ! Adieu paix ! Adieu la Côte d'Ivoire réunie ! Tout ça pour ça ! J'espère que l'U.A ne s'attend pas à ce que les Ivoiriens lui disent merci. On peut franchement se demander si les dirigeants africains se montreront un jour dignes de leurs populations qui attendent un peu plus d'audace de leur part. Question : sur quelle base se fonde l'U.A pour confier la présidence de la République à Alassane Ouattara plutôt qu'à Laurent Gbagbo ? Le premier fanfaronne en claironnant que le fait de lui confier la formation de ce gouvernement est la reconnaissance de sa victoire. Le pauvre ! S'il avait gagné, personne ne l'obligerait à former un gouvernement d'union. Se dire vainqueur et être obligé d'accepter de composer un gouvernement hétéroclite qui vous empêchera de travailler, c'est reconnaître qu'il n'y a pas eu d'élection présidentielle. Huit ans de cohabitation désastreuse, ça suffit !

 

                        Dernière solution : la guerre ?

 

            Au moment où certains cherchaient des solutions diplomatiques, les rebelles d'Alassane Ouattara avaient décidé de violer le cessez le feu qui avait coupé la Côte d'ivoire en deux et d'attaquer la zone sud loyaliste. Pas un seul journal européen n'a condamné cette violation. Pas un ! Par contre on ne cesse d'annoncer ça et là leur victoire "à mains nues" - comme dit notre ami blogueur Delugio - contre l'armée de Laurent Gbagbo. L'ONU et les ONG n'ont toujours pas enregistré un seul mort dans les villes attaqués par les rebelles. Les saints hommes !

 

            Fin politique, Laurent Gbagbo a le défaut d'être attentiste quand ses ennemis sortent les armes. C'est maintenant qu'il doit montrer à ceux qui ont choisi de le combattre par le feu qu'ils ont de fortes chances de périr par le feu. Je ne cesse de me demander pourquoi il n'a pas profité de la violation du cessez le feu pour lancer une contre offensive de très grande envergure pour montrer à l'ennemi un peu de la force de son armée. Cette passivité fait raconter à ses ennemis sur les ondes des radios françaises qu'il n'a pas d'armée (dixit l'ambassadeur d'Alassane Ouattara à Paris).

 

            Certes, déjà L'Onuci convoie les rebelles dans Abidjan comme de simples voyageurs en danger en terre étrangère qu'il convient de protéger leur permettant ainsi de rejoindre leurs bases où ils détiennent leurs armes. C'est ainsi que les rebelles sont en mesure d'attaquer ou de saccager des sites stratégiques dans la capitales. Certes, la France et l'ONU seront toujours du côté des rebelles. Mais il convient de ne pas oublier que la lutte continue et que si elle change de terrain, il faut y aller sans tarder au risque d'être débordé et laisser les civils se faire la guerre à la place des professionnels.

 

*Dans le parler populaire ivoirien, « être garçon » c’est avoir du cran, être audacieux, « être cap » comme disent les jeunes en France et ailleurs en Afrique.           

             

 

Raphaël ADJOBI

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06 mars 2011

Une année chez les Français (un roman de Fouad Laroui)

                        Une année chez les Français

                                 (Un roman de Fouad Laroui)                              

 

Chez_les_Fran_ais_0006_crop            Ne vous attendez pas à trouver sous ce titre une version africaine des Lettres persanes de Montesquieu. Non, Fouad Laroui ne place pas ici la société française sous le regard inquisiteur ou critique de l’étranger venu d’Afrique. Sous ce titre trompeur se cache en réalité l’histoire d’un petit garçon marocain amoureux de lectures qui, grâce à une bourse, entre au lycée français de Casablanca. Un boursier de la République française, on en prend soin forcément ! Mais, pour le bonheur du lecteur, la présence sans interruption à l’internat du petit Mehdi va déranger le « bon ordre de l’univers français ».

 

Au début des indépendances, les Africains qui avaient la chance de faire leurs études parmi les Français étaient généralement remarqués surtout pour la manière admirable dont ils maniaient la langue française. N’ayant auparavant jamais côtoyé d’autres milieux français que le monde des livres, donc la langue littéraire ou soutenue, ils ne savaient s’exprimer que par imitation des ouvrages lus. C’est le cas du jeune Mehdi qui, dans son village natal avait pour consigne familiale de ne s’exprimer que dans la langue de la Comtesse de Ségur, même quand ses parents s’adressaient à lui dans la langue dialectale. Et lorsqu’il entre au lycée français de Casablanca, - que le parler populaire a baptisé « Le lycée des français » - il  va confronter le talent acquis grâce à cette expérience à la réalité du terrain où s’entrechoquent argot, langage familier et expressions populaires de tout genre. Un cocktail hilarant magnifiquement servi par Fouad Laroui. Un vrai régal !

 

            Le monde des adultes que côtoie Mehdi est en effet très varié en personnalités. Une série de portraits pittoresques qui sont pour l’enfant un véritable laboratoire où il trouve les éléments nécessaires à la vérification de ses connaissances ou plutôt des images livresques qui constituent son savoir. Des essais drôles parce que souvent malheureux. On lit ce livre en ayant constamment en tête l’exacte vérification de l’expression « un chien dans un jeu de quilles ».

 

            Mais rassurez-vous. Si on rit beaucoup en lisant ce livre, Mehdi n’est jamais ridicule. Il reste un enfant attentif, désireux d’apprendre et de faire bon usage de la belle langue française, mais aussi un enfant capable de mentir. Si les premiers chapitres du livre – les cinq premiers sont organisés dans un mouvement cyclique - expliquent la raison de sa présence et son intégration au « lycée des français », les derniers chapitres le présentent dans un univers insolite parce qu’il a été capable de mentir comme tous les enfants savent le faire quand ils veulent se tirer d’affaire.       

   

Quel plaisir de retrouver, en lisant ce livre, son âme d’enfant ; une âme vagabonde qui fait et défait le monde à souhait, surtout quand elle a le malheur de se trouver dans des situations inextricables. Ce livre est une véritable fontaine de fraîcheur sans doute liée à la candeur du personnage de Mehdi. L’usage constant du style indirect libre permet d’entrer dans sa conscience, d’y lire ses doutes et les solutions qu’il imagine pour résoudre les énigmes qui se forment comme des nœuds dans la chaîne de ses savoirs. Pauvre petit, se dit-on ! Pourtant, on ne peut s’empêcher de rire aux larmes.

 

Raphaël ADJOBI

 

Titre : Une année chez les Français (304 pages)

Auteur : Fouad Laroui

Editeur : Julliard, 2010

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