05 août 2008
Du racisme français (Odile Tobner)
Du racisme français
La couverture et le titre du livre d’Odile Tobner apparaissent à première vue racoleurs surtout dans cette période où il est de bon ton de parler du racisme dont font preuve un certain nombre de dirigeants et d’élus politiques sans oublier certains « peoples ». En réalité, c’est un ouvrage d’étude très sérieux et très complet que je conseille aux universitaires, aux hauts fonctionnaires et hommes politiques africains.
L’introduction du livre reprend les différents propos racistes de Nicolas Sarkozy, de Jacques Chirac, de l’académicienne Hélène Carrère d’Encausse à qui l’auteur décerne la palme (sans jeu de mots), de Alain Finkielkraut, de Pascal Sevran, de l’élu socialiste Georges Frêche et les confronte à la bonne conscience des intellectuels et des gens instruits et à leur impudence à nier le racisme en France. Odile Tobner y indique ensuite clairement son objectif : fouiller dans les bibliothèques et donc dans les textes pour mettre à jour « comment s’est constitué le racisme tranquille qui sous-tend toute opinion, même bienveillante, à l’égard des Noirs » et « comprendre pourquoi, aujourd’hui, les affirmations les plus objectivement scandaleuses sont couvertes du voile d’une indulgence complice ». Comme l’écrit l’éditeur, « Odile Tobner révèle que la négrophobie fait partie de l’héritage français ».
C’est donc un livre de recherches qui part du 16è siècle où la traite négrière et l’esclavage font du racisme « une véritable innovation moderne » bâtie comme une idéologie au service du capitalisme pour s’approprier le monde. En effet, « une civilisation qui est prête, par tous les moyens, même les plus violents, à convertir le reste du monde à ses valeurs idéologiques doit avoir, selon l’auteur, une grande tranquillité d’âme, un grand sens de son bon droit ». Et c’est ce souci de la tranquillité de son âme et de son bon droit qui pousse la France à développer des idées de tout genre pour justifier son comportement. C’est exactement ce qui se passe dans la fable du Loup et de l’Agneau de La Fontaine : accuser faussement pour justifier l’injustice que l’on accomplit.
Elle présente et analyse les thèses racistes professées par les auteurs français à travers quatre siècles et donne à leur suite les réactions africaines et antillaises les plus vibrantes comme celles de Frantz Fanon, René Maran, Cheikh Anta Diop et de Aimé Césaire. Elle n’oublie pas non plus les réactions des Européens comme Anténor Firmin et Melville J. Herskovits que les Africains gagneraient à lire.
J’ai pour ma part particulièrement apprécié les analyses que fait l’auteur des théories racistes à prétentions scientifiques de Montesquieu, et l’étude très approfondie de la pensée de Frantz Fanon. J’ai également été très sensible à toutes ses réflexions personnelles que lui ont inspirées ses lectures des propos des auteurs français (Bossuet, Montesquieu, Lucien Lévy-Bruhl, Guillaume Apollinaire, Olivier Pétré-Grenouilleau …) qui sont parfois de véritables niaiseries qu’on hésiterait à attribuer à un enfant ou à un simple d’esprit. Toutes ces absurdités qui font que l’on lit ce livre la colère au ventre et l’esprit tendu comme un arc.
Raphaël ADJOBI
Titre : Du racisme français
(quatre siècles de négrophobie)
Auteur : Odile Tobner
Editeur : Les arènes (2007)
28 juillet 2008
L'autobiographie d'une esclave
L’autobiographie
d’une esclave
(Roman)
L’introduction de ce livre répond à une interrogation incontournable pour quiconque entreprend de se plonger dans la littérature noire américaine. Quel est le premier roman noir et qui en est l’auteur ?
L’on y découvre qu’aux Etats-Unis, au mois de février, le peuple noir de ce pays célèbre l’héritage afro-américain et encourage sa sauvegarde par des séminaires et commémorations diverses, des conférences et des cérémonies solennelles en hommage à leurs ancêtres dont les sacrifices ont permis d’obtenir la liberté dont ils jouissent aujourd’hui. Et durant ce mois est organisée une vente aux enchères de « documents imprimés, manuscrits et témoignages divers de l’héritage culturel afro-américain ». C’est au cours de la manifestation de 2001 qu’un professeur d’Harvard fait l’acquisition d’un manuscrit original présenté comme « une biographie romancée, rédigée dans un style fleuri, censée raconter l’histoire de la vie et de la fuite d’Hannah Crafts, mulâtresse née en Virginie ».
L’acquéreur de ce manuscrit voit tout de suite l’intérêt que l’on peut tirer de ce manuscrit s’il s‘avérait qu’il n’a jamais été publié et si sa narratrice était noire. Car ce qui est vrai aux Etats-Unis, c’est que « la littérature noire » des récits d’esclavage comme la Case de l’oncle tom (Beecher Stowe) était le fruit du travail des blancs. Il savait que les textes rédigés à la main par les Noirs aux XIXè siècle sont excessivement rares. Les nombreux récits d’esclavage, les autobiographies et les pamphlets de cette époque étaient écrits grâce à l’intervention de rédacteurs ou d’éditeurs abolitionnistes. Surtout les œuvres de fiction éditées et diffusées avant la fin de la guerre de Sécession l’ont été par les membres du mouvement abolitionniste blanc.
L’Intérêt du Livre
L’intérêt de ce livre réside donc dans le fait qu’il est de manière incontestable l’œuvre romanesque d’une esclave mulâtre rédigée de sa propre main dans les années 1850. C’est l’authentique production d’une esclave nourrie de la littérature romanesque du XIXè siècle. La narratrice emprunte les descriptions particulièrement frappantes de la pauvreté et du dénuement à ses lectures livresques. Ses nombreuses références aux textes bibliques témoignent par ailleurs de l’esprit anglican qui dominait la littérature américaine.
Ce livre est donc l’occasion de pénétrer directement dans l’esprit d’une esclave en fuite et lire sa vision de la société. La manière de caractériser l’intimité entre les blanches et les noires laisse croire que seule une noire ayant connu la servitude est capable de tant de justesse. Elle est également très franche au sujet des sentiments que lui inspirent les autres esclaves. Elle est fidèle quant à la manière des Afro-américains de se parler entre quand les blancs ne les entendent pas. Enfin, ses propos sur l’esclavage sont d’une franche simplicité. Ainsi, elle estime que « le plus grand fléau de l’esclavage c’est son caractère héréditaire ». Ce qui l’emmène à juger scandaleux le mariage entre les esclaves. D’autre part, il faut connaître la servitude pour écrire « ceux qui s’imaginent que les plus grands maux de l’esclavage résident dans la souffrance physique n’ont pas une idée juste et rationnelle de la nature humaine. » Les péripéties de sa fuite nous éclairent sur la manière dont les noirs vivent leur condition d’esclave.
Raphaël ADJOBI
Auteur : Annah Crafts
Titre : Autobiographie d'une esclave
Edition : Petite Bibliothèque Payot
(traduit de l'anglais)
24 juin 2008
Joseph Kessel sur la piste des esclaves
Joseph Kessel sur la piste des esclaves
Au début du 20 è siècle, entre les deux grandes guerres, alors que sur le continent européen de jeunes étudiants africains, nourris aux idéaux de la liberté et de la dignité humaine, pourfendaient par des discours enflammés le colonialisme européen en Afrique, sur la terre de leurs ancêtres sévissait un fléau qu’ils ne voyaient pas ou qu’ils ignoraient parce qu’il était d’un autre type : le commerce des esclaves.
Le romancier Joseph Kessel, l’ami des truands, des noctambules et de tous ceux qui aiment les aventures risquées, était devenu un journaliste célèbre après un reportage retentissant sur la guerre anglaise en Irlande. Dans un ouvrage volumineux (934 pages) mais magnifique, Yves Courrière retrace la vie de ce colosse né en Argentine de parents russes. Des dizaines d’anecdotes sur sa vie fourmillent dans ce livre.
En 1930, lors d’un séjour en Egypte, Joseph Kessel fait la connaissance d’un trafiquant d’armes et le voici embarqué comme grand reporter du journal Le Matin aux confins de l’Afrique pour découvrir la réalité du commerce des esclaves noirs. Plutôt que de commenter le livre, je vous offre ici quelques extraits qui se veulent le témoignage d’une réalité vécue et donc indiscutable. N’oubliez pas que les événements se déroulent au début du 20 è siècle et que les luttes pour la décolonisation de l’Afrique sont déjà en germes.
« Au cours de ses pérégrinations dans la ville à la recherche de Saïd, que personne ne semblait connaître, Kessel accumula les preuves des mauvais traitements infligés aux esclaves. Il entendit les cris déchirants d’un jeune garçon battu à mort pour avoir volé à son maître une demi-bouteille de tetch (1), il vit un homme et une femme pendus par les pieds au-dessus d’un feu où le maître jetait à poignée du piment rouge qui leur brûlait yeux et poumons… » (p. 359).
Au crépuscule, Kessel, ses amis et leur guide parvinrent à un village aragouba. « Tandis qu’ils parcouraient les ruelles du village [… ], Saïd révéla au journaliste français comment il se procurait les esclaves ;
- J’ai deux moyens. Quand un village est trop pauvre ou son chef trop avare pour payer l’impôt, il s’adresse à moi. Je donne l’argent et je prends des esclaves. L’autre moyen est d’avoir des chasseurs courageux. Quand j’ai le nombre de têtes suffisant, je les rassemble dans un entrepôt comme celui-ci.
Ils étaient arrivés dans une cour où quelques planches traînaient par terre. Saïd les souleva et Kessel, en se penchant sur le trou profond qu’elles masquaient, vit quatre femmes endormies. Dans une cave voisine, gardés par un convoyeur au visage farouche, six esclaves étaient étendus. Dans la suivante, ils étaient trois. » (p.362-363).
Une scène de chasse : Après une longue marche, harassés et ruisselants, Kessel et ses amis « se retrouvèrent au crépuscule devant une vallée miraculeuse où serpentait un petit cours d’eau. L’herbe y était grasse, les bouquets d’arbres verdoyants. Sur le versant opposé, de minuscules silhouettes de femmes conduisaient un troupeau tintinnabulant du pâturage vers quelque hameau perdu dans la montagne. Incapable de communiquer avec Sélim, qui parlait un idiome inconnu (…), Kessel renonça à lui demander de quel animal il préparait l’affût. […] Jef se sentait plein d’admiration pour ce jeune chasseur assez habile pour affronter un animal, seulement armé d’un poignard. […]
Au réveil,, les quatre hommes virent Sélim à plat ventre à l’entrée du couloir étroit. Tel un jaguar, il épiait, les muscles immobiles, les yeux rivés au sentier, la main crispée sur un morceau de cotonnade. Comme la veille au soir les clochettes du troupeau tintèrent faiblement… leur bruit se rapprocha… des bœufs puis des chèvres passèrent près du buisson d’épineux… et Sélim bondit.
La fillette qui suivait le troupeau n’avait pas eu le temps de pousser un cri. Bâillonnée, entravée par la cotonnade, elle n’était qu’un mince paquet sans défense sur l’épaule de Sélim qui gravissait la sente avec l’agilité d’un chamois […] abandonnant l’équipe du Matin qui venait d’assister à un rapt comme cette région du monde en connaissait depuis des millénaires ! » (p.363-364)
Les images que je joins à ce récit sont également du 20 è siècle. Si les pays européens qui ont également pratiqué l’esclavage l’ont déclaré « crime contre l’humanité », nous ne devons pas oublier qu’au 21 è siècle des pays africains et du Moyen Orient ne lui reconnaissent toujours pas ce caractère criminel. Ainsi, l’esclavage a été aboli trois fois en Mauritanie : en 1905 sous la colonisation française ; en 1960 lors de l’indépendance, et en 1980 par le pouvoir militaire. C’est dire la difficulté pour ce pays et d’autres à éradiquer cette pratique. Mais en réalité, s’il y a difficulté à éradiquer le mal, c’est parce que la loi officielle n’est jamais accompagnée de mesures de réhabilitation des personnes en état d’esclavage ; ce qui les obligent donc à demeurer sous le joug de leurs maîtres.
1. Hydromel violent qui porte vite à la tête. Boisson nationale éthiopienne.
Raphaël ADJOBI
18 juin 2008
Les Sarkozygirls
Les Sarkozygirls
Que penser des trois ministres françaises issues des minorités que Nicolas Sarkozy a placées au devant de la scène politique nationale comme une esquisse de sa politique de discrimination positive qui n’aura jamais lieu ?
Soyons francs ! Nombreux étaient les Français, surtout les Afrodescendants, qui avaient peur que cette expérience se solde prématurément par un échec retentissant ou tout simplement par une présence invisible. A notre grande surprise, ce sont ces femmes qui font l’actualité. Exit Alliot Marie devenue transparente. Depuis un an, des femmes au gouvernement, on ne parle que de Rachida Dati, de Rama Yade et de Fadela Amara dans une moindre mesure.
Rachida Dati : Que n’a-t-on pas dit sur cette dame et que ne continue-ton pas de raconter sur elle ! Très vite, la Garde des sceaux et ministre de la justice a suscité la rébellion des magistrats. Ce n’était pas la politique du gouvernement que l’on critiquait mais bien la personne que l’on trouvait cassante, peu conciliante. Elevée au rang de favorite du Président, elle était invitée partout ; et les journalistes se plaisaient à la photographier, à épier ses moindres gestes, à interpréter ses moindres paroles. Après le divorce du Président et la disparition de Cécilia Sarkozy des projecteurs des journalistes, l’opinion publique a fait d’elle l’amie intime du Président, voir son amante et parfois même la future épouse du Président.
Après le remariage du Sarkozy avec Carla Bruni, Rachida Dati est tombée en disgrâce auprès des médias. Désormais on ne voit en elle qu’une dépensière, la « cigale » du gouvernement selon une revue people. Le président lui-même a fini par croire à un lynchage injustifié et a volé à son secours lors d’un conseil des ministres.
Rama Yade : C’est la rebelle de l’équipe Sarkozy, se plaît-on à le souligner. Souvenons-nous de sa sortie retentissante quelques jours avant la visite officielle du Président libyen Kadaffi. Elle a estimé que la France n’était pas un paillasson sur lequel les dictateurs pouvaient venir essuyer leurs pieds. Les journalistes en ont alors fait la conscience de la France. Cela ne l’a pourtant pas empêchée de les traiter de charognards prêts à faire de la vie du président de la République une pitance facile. Souvent invitée en province où on se bouscule pour la voir, Rama Yade est devenue en un an une image de la vie publique française alors qu’elle n’est qu’une Secrétaire d’Etat.
Fadela Amara : Son opposition à son ministre de tutelle Christine Boutin qui semblait ne pas apprécier son plan banlieue a fait d’elle une rebelle. Madame Boutin voulant absolument jouer à la patronne qui supervise le travail de sa Secrétaire d’Etat a tout de suite été dépassée. D’autre part, il faut avoir du courage comme Fadela Amara pour affirmer ne pas voter pour Nicolas sarkozy en 2012.
Il apparaît finalement que si les minorités sont absentes de la scène politique française, ce n’est point parce que l’on a peur qu’elles ne soient pas à la hauteur mais tout simplement par discrimination raciale. D’autre part, si ces populations sont absentes de ces postes de responsabilité, c’est parce qu’elles souffrent elles-mêmes du complexe de l’étranger qui ne doit pas se mêler des affaires des autochtones. Il est donc temps de vaincre ce sentiment et oser entreprendre des conquêtes politiques en militant nombreux dans les structures qui y mènent ou en créer.
Raphaël ADJOBI
10 juin 2008
Obama et l'ombre de Kennedy
Obama et l’ombre de Kennedy
Pour justifier sa persistance à poursuivre les primaires jusqu’en juin – ce qu’elle a fait – Hillary Clinton avait rappelé que Bobby Kennedy avait été assassiné en juin 1968. En d’autres termes, elle voulait que l’on comprenne qu’elle se positionnait comme l’alternative incontournable « au cas où ». Un tel argument de campagne avait glacé plus d’un.
Cependant, si du côté de l’Europe ces propos ont été perçus comme une maladresse, de l’autre côté de l’Atlantique l’éventualité d’une atteinte à la vie du sénateur de l’Illinois était depuis longtemps une réalité dans l’esprit des populations et dans les milieux politiques.
Dans son édition d’avril 2008, le luxueux magazine de mode « L’optimum » avait déjà repris le sujet sur la forme d’une interrogation : « Barak Obama le Kennedy noir ? » Le contenu de l’article de David Martin Castelnau est sans équivoque : Dans le style élégant et le charisme, Obama est, selon lui, le Kennedy Black. Et il ajoute : « a vouloir vivre, marcher, parler, promettre et vaincre comme Kennedy, Obama risque de finir comme lui. La cervelle sur le capot. »
Au début des primaires, cette éventualité m’avait à peine effleuré l’esprit. Mais depuis la lecture de cet article, je ne cesse de penser à John F. Kennedy, à son frère et aussi Martin Luther King. Il semble qu’en pensant à ces trois-là, je ne fais qu’imiter les supporters américains d’Obama qui, selon Philippe Coste (l’Express du 29 mai), représentaient les Kennedy et le célèbre pasteur noir en effigies fantomatiques au-dessus du candidat démocrate sur les pancartes de campagne, persuadés qu’un drame se prépare.
Quand les services de sécurité américaine ont attaché au service du candidat Obama une escouade comparable à celle de Georges Bush alors qu’il n’était pas encore le candidat officiel des démocrates, le camp Clinton a crié à la paranoïa. Et quand Hillary Clinton évoquait la mort tragique de Bobby Kennedy, elle ne faisait que surfer pour ainsi dire sur la vague d’une opinion qui jouait à un jeu macabre.
Loin de l’Amérique, chaque jour je redoute le drame. Ai-je tort ? Ce serait trop bête de gâcher tant de rêves, tant d’espoirs qui animent des cœurs en Amérique et ailleurs ! Devant cette hypothèse, il m’est difficile d’imaginer Obama vainqueur de McCain en novembre prochain.
Et puis, le 4 juin dernier sur Antenne2, en entendant Ted Stanger – l’auteur de Sacrés Français – je me suis dit qu’une autre sortie est possible. Ted Stanger pense que le rêve de beaucoup de gens, dont moi, va se heurter au mur du racisme. Il affirmait ce soir-là qu’en novembre, dans l’isoloir, c’est McCain qui aura la préférence des Américains. Car, selon lui, loin des yeux, dans leur for intérieur, la majorité blanche profondément raciste ne votera pas Obama. « Le racisme est encore très vivant dans mon pays », ajoutait-il. Je me suis dit que ce sera tout de même une sortie démocratique parce que les urnes auront parlé.
Mais que m’arrive-t-il ? voilà que tout à coup j’ai comme le sentiment que ce sénateur Obama est devenu un familier, un ami, un frère. Peut-être que vous êtes comme moi à croiser les doigts et à trembler pour lui. Même la presse française qui s’était jetée à corps perdu dans le soutien à John Kerry lors des dernières élections où celui-ci a échoué joue la prudence alors qu’elle est pro-Obama (sauf le journal chrétien La Croix). Elle ne voudrait pas lui porter malheur.
Comme beaucoup, je prie pour avoir tort de m’inquiéter, pour avoir tort de ne pas faire totalement confiance aux efforts faits par les Américains pour la réconciliation entre les noirs et les blancs. Je prie pour que la course au capitole soit loyale et non pas freinée par l’entreprise d’un raciste ou d’un malade rêvant de célébrité. Obama n’est rien pour moi. Mais si je tremble pour lui, c’est sans doute que j’ai le secret espoir que sa victoire servirait la cause des noirs à travers le monde et particulièrement en France où peu de noirs accèdent à de hautes fonctions administratives et politiques pour cause de racisme.
Raphaël ADJOBI
03 juin 2008
Les Codes Noirs
Les Codes Noirs
Celui qui désire comprendre l’esprit qui animait les autorités françaises à l’époque de la traite négrière sera heureux d’avoir ce petit livre en sa possession. Outre les deux Codes Noirs, il contient également différents Arrêtés, Décrets, Proclamations et Protocoles français et internationaux touchant les esclaves du XVII è au XX è siècle.
A la lecture des deux Codes Noirs, je n’ai pas cessé de me demander pourquoi les dirigeants africains ont laissé leur peuple dans l’ignorance de faits historiques aussi importants. Je suis certain que la connaissance de telles règles esclavagistes nous auraient aidés à une meilleure compréhension du message des chantres de la négritude.
Par ailleurs, en lisant le texte de Christiane Taubira en introduction de ces deux Codes Noirs, je me suis posé cette question : combien d’hommes politiques français connaissent réellement la vraie histoire de France au-delà des notions classiques sur Jeanne d’Arc, Napoléon, Charles De Gaulle, la vie des rois et des reines, et les histoires de résistants durant les deux grandes guerres ? Sincèrement, je crois que peu de Français s’aventurent hors des sentiers battus. Le racisme qui persiste dans ce pays malgré les bonnes intentions des textes et des discours officiels confirme cette méconnaissance d’un pan entier de l’histoire de France.
Deux Codes Noirs, un même esprit
Le premier Code Noir date de mars 1685 et a été signé par Louis XIV. Trente-huit ans plus tard – décembre 1723 - Louis XV signe le deuxième Code Noir.
Aujourd’hui, bon nombre d’historiens et de commentateurs publics voudraient nous faire croire que les deux Codes visaient essentiellement à améliorer la vie des esclaves violentés par leurs maîtres. Quiconque professe cela est un menteur ; et c’est ce que Christiane Taubira a démontré dans son introduction.
Il apparaît en effet dans les deux Codes que l’esprit du royaume de France était de réglementer le joug de l’esclave ; en d’autres termes déterminer de façon claire le champ d’action de l’esclave dans lequel le maître doit le maintenir. Celui-ci a peu de devoirs. Au regard des codes, le maître « criminel, barbare et inhumain » (art. 26 du 1er Code, art. 17 du 2è Code) est celui qui ne fournit pas le nombre de vêtements fixé par la loi à ses esclaves. C’est tout ! On croit rêver ! Et il doit veiller à ce que son esclave ne nuise pas à son voisin. Si le dimanche le maître ne doit pas faire travailler son esclave dans les champs, il ne doit pas non plus l’autoriser à vaquer à des occupations champêtres ou artisanales pour son propre compte. C’est à peine croyable !
Cela montre tout simplement que toute initiative personnelle est interdite à l’esclave par les deux codes : il ne doit pas fabriquer ou produire pour son compte. Il ne peut ni vendre, ni acheter, ni aller librement d’une cité à l’autre, il ne peut se marier sans le consentement de son maître. Il ne doit pas avoir de bien propre : la quantité des produits de consommation dont il dispose est rigoureusement contrôlée par le maître. Il n’a pas le droit de disposer d’une journée libre pour vaquer à des occupations personnelles. La parole d’un esclave est nulle devant les tribunaux ; ils ne sont donc pas autorisés à témoigner. En clair, ils sont les objets de leurs maîtres et ne doivent donc jamais décider ou entreprendre librement. Les deux Codes déclarent « les esclaves être meubles et comme tels entrer dans la communauté, (…) se partager également entre cohéritiers » (Art. 44 du 1er Code, art. 39 du 2è Code).
Pourquoi un deuxième Code Noir 38 ans après ?
Trente-huit ans après le premier Code, celui du 18è siècle insiste sur deux éléments qui semblent montrer une certaine évolution de la société. Cependant, il convient de rappeler que les deux Codes n’avaient pas la même destination géographique. Le Code de mars 1685 se rapporte aux esclaves des îles de l’Amérique et celui de décembre 1723 concerne les esclaves des Îles de France et de Bourbon (Île Maurice et la Réunion). Il ne faut donc pas parler d’évolution de la société mais de situation légèrement différente.
Si le deuxième Code reprend les termes du premier et en garde l’esprit, on constate l’insistance sur l’interdiction des mariages entre « les sujets blancs de l’un et l’autre sexe (…) avec des noirs » ainsi que le concubinage. D’autre part – toujours dans le deuxième code – il est interdit aux esclaves de travailler dans la fonction publique.
Le simple faite que ces éléments soient mentionnés dans ce dernier Code laisse croire que des esclaves avaient atteint un certain degré d’instruction pour prétendre (aux yeux de quelques individus) accéder à certaines fonctions publiques. On peut aussi croire que des relations particulières entre noirs et blancs avaient tendance à s’afficher ouvertement. Le Code était donc là pour permettre aux détracteurs de ces liaisons d’avoir les moyens de punir ceux qui oseraient élever par leurs liaisons des esclaves au rang d’êtres humains.
Raphaël ADJOBI
Titre : Codes Noirs
De l’esclavage aux abolitions
Introduction : Christiane Taubira
Edition : Dalloz 2006 (150 pages ; petit format / 2 €)
29 mai 2008
Sang négrier
Sang négrier
Sang négrier est le premier de deux « récits sidérants » comme le précise le sous-titre du recueil Voyages en terres inconnues. C’est une nouvelle, brève (27 pages), d’une rare beauté et de surcroît poignante.
Certes, c’est une nouvelle fantastique ; ce qui suppose une part d’indéfinissable parce que les événements dépassent l’entendement humain. « Cinq esclaves qui s’échappent d’un bateau négrier, une traque dans les rues de Saint-Malo … et l’inconcevable qui surgit, sous la forme d’un doigt sanglant cloué à une porte ! » Mais c’est également un récit au ton très réaliste mené par le nouveau commandant du navire négrier qui poursuit la routine de convoyer des captifs depuis l’île de Gorée vers l’Amérique, le Nouveau monde. Rigoureux et professionnel, le narrateur nous fait entrer dans la conscience des maîtres de la traite négrière qui ne font rien au hasard. Négrier, c’est un métier qui rapporte mais qui connaît des aléas.
Je conseille vivement ce petit livre à tous les adultes et aussi aux élèves à partir de la 3è. Les enseignants des lycées africains auxquels je pense et leurs élèves des lycées y trouveront un bon sujet de discussion sur l’esprit des négriers à l’époque du commerce dit triangulaire.
Laurent Gaudé, l’auteur, a fait preuve ici d’une grande justesse dans le rendu des propos et du comportement du personnage principal. Il est très convaincant. Je n’ai relevé qu’une seule erreur : les captifs africains ne parlaient pas tous la même langue. On ne pouvait donc pas au hasard choisir des éléments pour toucher les autres par le discours.
°Petite remarque à l'attention des élèves : tant que les Noirs ne sont pas arrivés dans les Amériques et employés par les colons, il ne faut pas parler "d'esclaves" mais de "captifs" ; tout simplement parce que ces êtres n'étaient pas esclaves en Afrique mais des hommes libres. Faites donc la différence entre un captif (personne capturée, enlevée de force) et un esclave (personne employée sous la force et l'autorité d'une autre).
Raphaël ADJOBI
Titre : Voyages en terres inconnues
(Première nouvelle : Sang négrier)
Edit. : Magnard / coll. Classique & Contemporains
Auteur Laurent Gaudé
21 mai 2008
Le bilan de Sarkozy
Le bilan de Sarkozy
Quelle année ! Quel début de présidence ! Il fallait avoir du souffle pour suivre les aventures de celui que les policiers appelaient Speedy Gonzalez quand il était au ministère de l’intérieur. Devenu Président, il a encore accéléré le rythme. Il a beaucoup parlé, abordé donc de sujets touchant la vie des Français. Mais…
Pour faire le bilan de la première année de la présidence de Nicolas Sarkozy, je prends ma vie de citoyen français et celle de mes amis et connaissances et cherche à savoir ce qui a changé dans notre quotidien. Est-ce que les objectifs du président Sarkozy se réalisent et changent favorablement notre vie ?
1. « Il faut travailler plus pour gagner plus », disait-il. Est-ce que ceux qui travaillent plus gagnent plus depuis un an ? Sur les feuilles de paie des français, en ce mois de mai 2008 où se font les déclarations de l’impôt sur le revenu, ceux qui ont fait des heures supplémentaires en 2007 constatent effectivement que ces heures accomplies sont exonérées d’impôt. Bravo donc Sarkozy ! Mais, le problème, c’est que tous ceux qui aimeraient faire des heures supplémentaires ne peuvent pas en faire. Car la réalité c’est que c’est le patron qui décide selon ses besoins. Il ne suffit pas que l’employé veuille en faire. Il est donc normal que certains crient à l’injustice.
2. La discrimination positive ! Quel beau rêve national ! Une volonté électorale qui, si elle avait été appliquée dans les administrations, aurait réhabilité les noirs et autre basanés dans le paysage social français. Rien à espérer à l’horizon de ce côté-là.
3. L’immigration choisie. Slogan électoral qui a rallié à Sarkozy les partisans du Front National. Pour le moment, le gouvernement n’est qu’à la phase « expulsions » des sans-papiers que l’on devrait plutôt appeler « les papiers illégaux ». A vrai dire, l’immigration choisie s’effectue depuis toujours : médecins africains et européens de l’Est dans les hôpitaux, ouvriers africains dans les usines et les services de sécurité, dans les tâches subalternes de l’hôtellerie, et employées africaines dans l’aide à domicile. Cependant, nombreux sont ceux qui travaillent avec des faux papiers. Il ne reste donc au gouvernement que la politique de l’expulsion avec pour objectif 25 000 reconduites à la frontière par an. Une politique de la terreur sur laquelle nous reviendrons dans un prochain article.
4. Le travail des seniors. Les seniors de plus de 55 ne sont plus, sous Sarkozy, dispensés de la recherche d’un emploi. Il propose de pénaliser tous ceux qui refuseront plus de deux propositions d’emploi « valables » ; qu’ils soient seniors ou pas. Le gouvernement affirme que la mesure vise à remettre les chômeurs au travail. En réalité, elle vise à faire des économies sur le dos de ces derniers. Car la réalité des faits est la suivante : les mesures Borlo qui visaient à pénaliser les employeurs qui font des économies en licenciant les seniors – trop chers selon eux – ont été vaines. Incapable de sanctionner les employeurs, l’Etat a décidé de sanctionner les chômeurs. C’est une solution facile et qui remet de l’argent dans les caisses.
5. La loi sur le divorce enterrée ! Dans les projets de Sarkozy, il est une mesure qui aurait Simplifiée la vie de beaucoup de français. Il était question de confier les divorces à l’amiable aux maires. Les citoyens n’auraient recours aux avocats que dans les cas de désaccord et donc de conflit. Au moment où l’on montre du doigt les lenteurs des tribunaux engorgés, on se serait attendu à ce que cette loi fût unanimement bien accueillie. C’était sans compter avec les avocats qui voyaient là un manque à gagner non négligeable. Et Sarkozy n’aime pas déplaire aux riches. Il abandonne donc cette loi et avec elle les usagers français. Dans ces conditions, on comprend très bien que les chauffeurs de taxi refusent que l’on touche à leur privilège même si tout le monde est persuadé que leur rareté empoisonne la vie des grandes villes. Ce protectionnisme catégoriel a d’ailleurs fait perdre à Paris le statut de ville de congrès et de grandes conférences internationales.
6. Les réformes de l’enseignement et des institutions. Pas facile de dégraisser le mammouth ! L’enseignement professionnel sera désormais sanctionné par le Bac au bout de trois ans au lieu de quatre. Là encore on soupçonne l’état de privilégier la réduction des heures et donc du personnel enseignant. Quant à la réforme des Institutions, nous attendons de voir les quinze points qui vont changer.
Avouons que les résultats sont bien maigres. Beaucoup de bruit pour rien donc.
Raphaël ADJOBI
15 mai 2008
Comment est né l'Etat dIsraël
Comment est né l’Etat d’Israël
Les 13 et 14 mai 2008, l’état d’Israël fêtait son soixantième anniversaire alors qu’au même moment, les Palestiniens commémoraient le soixantième anniversaire de La Grande Catastrophe. Pour la première fois, les médias français n’ont pas manqué d’associer les deux événements qui sont naturellement indissociables. Et on peut louer la justesse des points de vue de bon nombre de journalistes français qui n’ont pas manqué, dans des émissions diffusées au début du mois de mai, de souligner les contrôles de tout genre que les Israéliens font peser sur les Palestiniens pour empêcher tout développement économique et social de cette population.
Mais je ne veux point ici traiter des relations entre ces deux peuples qui se disent naturellement ennemis. Je voudrais tout simplement vous emmener vers une source singulière de la naissance d’Israël et en tirer une conclusion tout à fait personnelle.
Tout le monde sait que c’est un acte de la Société des Nations qui, il y a 60 ans, donna naissance à l’Etat d’Israël. Tout le monde peut aussi aisément imaginer qu’il y a des hommes qui ont préparé cet acte. Mais c’est là qu’apparaît la singularité de la naissance de ce pays. Et il m’a fallu lire un livre magnifique pour découvrir la véritable origine de la colonisation de la Palestine par les juifs avec la complicité des organisations internationales.
C’est dans la biographie de Kessel par Yves Courrière que j’ai ppris le rôle déterminant joué par par Haïm Weizmann, ce biolorusse né en 1874, qui deviendra le premier président de la République du tout nouvel Etat d’Israël. Cet homme était devenu l’ami de Théodor Herzl, le grand Théoricien du retour des juifs en Israël. A la mort de ce dernier, le premier reprendra le flambeau du sionisme mondial et réalisera l’œuvre du grand Théoricien. Voici comment.
« Après la rencontre avec Théodor Herzl, Weizmann, devenu ardent propagandiste, avait émigré en Angleterre où il avait occupé un poste de professeur à Manchester. Naturalisé anglais en 1910, ce chimiste de génie avait travaillé pendant la Première Guerre mondiale dans les laboratoires de l’amirauté britannique où il avait découvert une acétone synthétique qui fut utilisée pour la fabrication des explosifs. Cette découverte essentielle en avait fait une célébrité aussi bien dans le monde scientifique que dans les cercles politiques britanniques. Profitant de ses importantes relations au sein du gouvernement, il avait obtenu, dès 1917, la fameuse déclaration Balfour selon laquelle, après la guerre, la Palestine, arrachée à la Turquie, serait reconnue comme foyer national juif. Depuis que la Société des Nations avait confié la Palestine en mandat au Royaume-Uni, Weizmann, élu à la tête de l’organisation sioniste mondiale, se battait pour que la promesse britannique devînt réalité et que le « foyer national » se transformât en Etat juif. Son principal souci était maintenant de trouver aux quatre coins du monde les capitaux nécessaires à l’émigration, au développement des colonies déjà implantées et à l’achat de nouvelles terres ». (page249)
La découverte d’un explosif contre un foyer de paix pour les juifs en Palestine. Tout le monde connaît la suite. 700 mille Palestiniens ont dû quitter leur maison au moment de la création d’Israël en 1948. Aujourd’hui, les nouvelles implantations ou colonies sont des machines à faire de nouveaux Israéliens. Ce sont des juifs étrangers de condition médiocre qui entrent en Israël pour grossir sa population. La simple visite de ces colonies est interdite aux arabes Israéliens, aux juifs Ethiopiens et aux Palestiniens. Seuls les étrangers et les autres juifs peuvent s’y aventurer.
Je retiens pour ma part que rien ne s’obtient gratuitement. Aucun peuple n’est généreux au point de vous offrir le paradis. Tout est une question de lutte, de pouvoir et d’influence. Tous les peuples, toutes les communautés qui aspirent à un certain mieux être, ont le devoir de se bâtir un pouvoir d’action. En définitive, c’est le moyen le plus sûr et le plus durable parce qu’il oblige l’opposant à revoir sa conduite. Quant au recours aux armes, il vous expose généralement à un retour de bâton douloureux.
Raphaël ADJOBI
Le passage cité est extrait de Joseph Kessel
Ou Sur la piste du lion (Yves Courrière),
Editions France Loisirs.
06 mai 2008
Discours sur la fin du monde
De la fin du monde
(Réflexion)
Quand la lumière du soleil faiblira jusqu’à ne plus nous éclairer, en d’autres termes, quand Dieu éteindra sa lanterne ou lancera « que la nuit soit », les ténèbres s’ouvriront, les éléments échappés du vase d’athanor, comme des hirondelles à l’appel de la saison nouvelle, accourront et s’y précipiteront.
Nous continuerons ça et là à rallumer nos torches et à entretenir le feu des foyers. Le temps passant, nos yeux s’habitueront à la lumière artificielle. Des enfants naîtront et ne connaîtront d’autre lumière que celle de l’artifice des hommes, et leurs yeux se formeront au patron de celle-ci. Mais peu à peu, sans soleil, la vie sur terre commencera à prendre une autre tournure. Il ne sera point besoin de cultiver les champs. Du bétail sans cesse plongé dans l’obscurité naîtront des animaux sans yeux ; la nature ne pourvoyant que ce qui est nécessaire à la survie de chaque espèce.
Progressivement, l’homme se lassera de lutter contre le poids des ténèbres et laissera mourir sa science. Car il vivra la fin du soleil comme une grande infirmité, une paralysie mortelle.
De la nuit des temps à l’ère du soleil et retourner à la nuit des temps, voilà le parcours de l’homme et de notre monde. Le point de départ sera donc le point d’arrivée ; c’est un parcours qui va se refermer sur lui-même. Et pourtant nous avons le sentiment de courir en ligne droite. Ce n’est qu’une illusion parmi tant d’autres auxquelles nous a soumis la disproportion de notre nature par rapport à l’immensité du monde et à la singularité des lois de l’univers. N’est-il pas vrai qu’en quelque point du monde où l’homme se trouve, il a le sentiment d’avoir la tête en haut et les pieds en bas tout simplement parce que la terre est sous ses pieds et le ciel au-dessus de sa tête ? Mais ce sentiment n’empêche pas la terre d’être ronde et de soumettre par conséquent à ce qui se trouve au pôle Nord une posture différente à ce qui se trouve au pôle sud. C’est une vérité physique vérifiable par tous qui me permet d’affirmer que celui qui est sur le sommet d’une boule et celui qui est placé en dessous de cette même boule regardent le ciel dans des directions différentes.
Nos illusions, nos inquiétudes et parfois même notre affolement devant les changements qui surviennent sur notre planète ne s’inscrivent donc que dans l’ordre des choses naturelles. C’est dire que les artifices des hommes qui nuisent à ce doux habitat s’inscrivent dans la vie de cette planète. Avant l’homme, d’autres espèces y ont vécu et ont disparu sans doute aussi par leur bêtise : trop gourmands, excessifs consommateurs d’énergie… Mais seul le déclin du soleil sera le véritable moteur de la mort de la terre. Tous les autres bouleversements ne seront que des éléments participant à son ordinaire évolution.
Raphaël ADJOBI