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Lectures, analyses et réflexions de Raphaël
30 janvier 2020

Fatima moins bien notée que Marianne (François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils)

       Fatima moins bien notée que Marianne

             (François Durpaire & Béatrice Mabilon-Bonfils)

Fatima moins bien notée que Marianne

Voici le livre que tous les jeunes désireux de s’engager dans l’enseignement doivent lire pour savoir dans quel monde ils mettent les pieds. Ils y trouveront des analyses très instructives de l’école française de ce XXIe siècle qui, en niant la diversité des populations et donc en cultivant la cécité devant les discriminations, a fait de la laïcité un «argument de maintien de l’ordre plus que comme une composante de l’émancipation».

     A l’heure où des populations venues d’horizons différents constituent de manière visible une nation diverse, parler d’une France enracinée dans un peuple unique, c’est plus que de la mythologie ; c’est un fantasme. C’est agir comme à l’armée quand celui qui commande crie : “je ne veux voir qu’une tête ! Et dans le cas de l’Education nationale, il s’agit bien de la tête “gauloise” ; ce qui ne peut que «générer un sentiment d’injustice, voire de discrimination».

     Afin de montrer les multiples inégalités que l’Education nationale cultive dans notre système d’enseignement, François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils ont fait appel à des spécialistes de divers domaines de recherche pour réaliser des enquêtes leur permettant de proposer des solutions claires et nettes. Cette contribution explique les graphiques très instructifs qui enrichissent ce livre. Ainsi, lorsque les auteurs clament que «c’est en apprenant ensemble que l’on apprendra à vivre ensemble», ils invitent nos autorités à une remise en question de la carte scolaire telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui. Mais surtout, ils insistent sur le fait que la laïcité n’est pas une garantie d’objectivité de l’enseignement dispensé parce que «historiquement, elle est idéologique, très engagée politiquement». 

     Il convient de retenir aussi qu’en France, si «les programmes sont nationaux et définis par le ministère de l’Education nationale […], le contenu des manuels est déterminé par les éditeurs et la seule loi du marché. Le choix de la langue et du style, la sélection des sujets et des textes, l’organisation et la hiérarchisation des connaissances obéissent à des objectifs politiques, moraux, religieux, esthétiques, idéologiques, économiques explicites et implicites». En d’autres termes, les enseignants qui en font leur bible plutôt qu’un simple outil doivent s’interroger sur la manière dont ils l’utilisent, se l’approprient, s’en inspirent, s’en désolidarisent parfois (p,64). En effet, à regarder les choses de plus près, un manuel scolaire n’est en définitive qu’à la fois «un support de la conservation de ce qu’une société choisit de dire d’elle-même, la trace des choix scolaires d’une époque», avant même d’être «un support de transmission de connaissances». Par conséquent, les enseignants – particulièrement les professeurs de lettres - ne doivent jamais oublier que les manuels scolaires «ont un rôle dans la formation des normes et des opinions des élèves». Leur coresponsabilité est donc indéniable ! 

Raphaël ADJOBI

Titre : Fatima moins bien notée que Marianne, 133 pages,

Auteurs : François Durpaire & Béatrice Mabilon-Bonfils.

Editeur : L’Aube, 2016.

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Commentaires
S
Cher atto, il faut absolument lire ce livre. Sur la laïcité, j'ai acheté la thèse d'avocat d'un de mes anciens élèves parce qu'il m'a convaincu quant au caractère aléatoire des règles de la laïcité. Et ce livre vient confirmer ce qu'il a écrit. Il faut lire ce genre de livre pour avoir des arguments face aux politiques et aux incultes qui se prennent pour des savants tout simplement parce qu'ils sont blancs et qu'ils ont les outils de communication en leur pouvoir.
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A
Bonjour Raph, <br /> <br /> Pour moi , la laïcité telle quelle aujourd’hui me semble satisfaisante, car le contexte de sa naissance était plus tendu que de nos jours. Si bien que ce texte je le trouve largement suffisant pour prendre en compte le radicalisme supposé des musulmans et l’instrumentalisation du criif. Mais je veux pointer du doigt la trahison de la gauche non seulement sur cette question mais également sur la question de l’école totalement abandonnée. Ce que nous voyons aujourd’hui, ce sont des slogans. A la place , il n’y a plus que l’antisemitisme qui tient lieu de l’alpha et l’oméga de la politique. A quoi d’autre pouvait on s’attendre avec les défenseurs des idées de Jules ferry. Je ne sais pas si on perçoit bien cette discrimination presque assumée, qui monte dans l’enseignement. Tant en terme de volonté que de moyens. Cela me fait redouter la révolte des banlieues de 2005 . Ajouter la crise des gilets jaunes . C’est un cocktail explosif qu’on nous prépare .
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